mercredi 29 avril 2015

Conte: La soif

Conte retranscrit d’un conte de Polo Coelho: la soif.

Un homme, sa femme et sa fille marchent sur une route. Quand passant près d’un chêne énorme, la foudre tombe de manière fortuite et tous trois foudroyés, passent le saut de la mort…

Ce fut si brusque, qu’ils ne se sont pas aperçus qu’ils avaient abandonné le monde d’ici-bas… Et il continuent comme si de rien n’était, leur chemin…
La route était très longue, le chemin élevé. après l'orage, le soleil est brûlant : ils sont en sueur, donc assoiffés…

Dans un virage, surprise… Un palais comme on en voit à Rome, puis ils voient un magnifique couloir de marbre qui conduit à une place pavée d’or. L’homme s’adresse à celui qui en garde l’entrée :
- Bonjour, Monsieur !
- Paix sur Toi, répond le Gardien
- C’est incroyablement joli ! Où sommes-nous ?
- Ceci est le Ciel, chercheur d’absolu !
- Comment est-ce possible !!  S’exclame-t-il avec allégresse. J’ai trouvé l’entrée ! Magnifique ! Nous sommes sauvés, et nous avons si soifs…
- Bien sûr, lui répond le gardien. Vous pouvez entrer et boire tout ce qu’il vous plaira !
Et le gardien indique la source mais en prenant soin de rajouter que seuls les hommes ont le droit à l’accès.
- Mais … ! Ma femme, ma fille …elles ont aussi soifs ! C’est ma compagne de vie, et notre fille…
- Désolé cher Ami ! Telle est la loi de notre Ciel ! Les femmes n’ont pas accès à La source… C’est très compliqué... C’était ainsi autrefois, et cela a toujours été …


Alors le marcheur déçu, se lève car même s’il a très soif, il ne veut pas être le seul à se désaltérer. Il refuse d’entrer et remercie le gardien, et reprennent le chemin.

Epuisés, assoiffés, à la sortie d’une grosse côte, les trois pèlerins arrivent à un autre endroit, dont l’entrée est marquée par une porte si vieille qu’elle en est rongée de partout.. Mais cette porte donne sur un joli sentier de terre parsemé d’arbres centenaires.

A l’ombre de l’un de ces arbres, il y a un homme couché, tête couverte par un chapeau de paille. Il doit certainement dormir sous ses brises de fraîcheur.

- Bonjour, dit le marcheur.
L’homme toujours couché répond par un geste de la tête.
- Nous avons très soifs, ma fille, ma femme, et moi-même.
- Il y a une source entre ces roches au carrefour, lui dit l’homme couché en indiquant du doigt le chemin. Vous pouvez boire toute l’eau que vous voulez.

L’homme, et les deux femmes s’en vont à la source et apaisent leur soif. Ils retournent alors remercier cet homme.
- Vous pouvez revenir si vous le souhaitez quand vous voulez, lui répond-il.- Mais où sommes-nous au fait ?
- au CIEL.
- Encore le Ciel ?!
- Mais il y a quelques heures, nous avons rencontré un gardien protégeant une allée de marbre et d’une place d’or qui m’a dit que c’était le Ciel là-bas ! Je ne comprends pas ?

- Mensonge ! dit l’homme en se redressant. C’était l’Enfer !


Le marcheur reste perplexe et pensif… Il prend à nouveau la parole :

- Vous devriez interdire qu’ils utilisent votre nom ! Cette fausse appellation est une tromperie et doit provoquer hélas de grandes confusions pour tous les gens perdus sur les sentiers !
- Au contraire ! reprit l’homme de l’arbre. En réalité, ils nous font une grande faveur ! Parce que tous ceux qui sont capables d’abandonner les êtres qu’ils aiment, quelque soit leur nature, restent là-bas…
Ici, nous vivons, en Esprit et vérité, quelque soit notre nature …

samedi 25 avril 2015

'' Croire '', c'est ...

- ''Croire'', qu'est-ce que ça change ?
Rien.
Lors d'un enterrement parmi ces hommes et femmes dans l'assemblée... Dans une salle d'attente d'un entretien d'embauche... Comment identifier celle ( celui) qui croit ?

- Quel intérêt à ''croire'' ?
Aucun
Un cœur de chair souffre plus qu'un cœur de pierre...(..) C'est toute la différence entre protéger son enfant contre une mauvaise nouvelle et la lui dire, afin de la consoler mieux...
( …) avoir dans l'épreuve ce qui nous manque : quelqu'un qui nous rejoint et marche avec nous.


- Quelle différence entre être seul dans un appartement vide ( absence de vie), et une présence silencieuse ( sieste de sa femme et ses enfants) .. ? 
«  Ce n'est presque rien. Un scientifique vous dirait que ces deux silences sont une seule chose : '' privation de toute vibration venant heurter l'oreille interne »


Derrière le silence de nos vies …. une présence.


J'ai repris, des mots, d'une chronique ( La Vie du 15 mars 2012) de Martin Steffens ( prof de Philo.)

mercredi 22 avril 2015

La primauté de la loi sur la religion, en question...

Un article de ''La Croix'' (18/04)  pose la question de la primauté de la loi sur la religion. 
Une vraie question, parce que la réponse ne m'est pas si évidente. De prime abord, j'ai tendance à dire que la loi prime sur la religion... Point ! Laïcité oblige …

A l'occasion de l'actualité proche, une nouvelle « proclamation humaniste » publiée par un collectif réunissant des historiens et des juristes appelle les responsables religieux à signer un texte « énonçant clairement des valeurs humanistes et républicaines » .  Ils leur demandent de reconnaître la « primauté de la loi civile démocratique ».

Même dans un contexte démocratique, la loi est-elle nécessairement ''bonne''.. ? Une discussion sur ce sujet amènera à nous situer sur le plan des ''valeurs''... Des ''valeurs'' peuvent-elles nous conduire - légitimement - à être 'hors la loi'... ?
La religion n'est-elle pas un ''contre-pouvoir'' ; et en tant que tel n'abolit-elle pas son influence en reconnaissant la primauté de la loi... ? L'histoire nous montre que la loi civile peut déraper ...



La loi peut-elle être un référentiel ultime ; au point de condamner toute objection de conscience … ? La loi est-elle incontestable ?
« En cas de dérive du système, par exemple lors de l’arrivée au pouvoir d’un parti extrémiste, et de promulgation d’un certain nombre de lois heurtant les valeurs républicaines, par exemple sur la bioéthique ou l’accueil des migrants, les religions ne pourraient donc plus jouer le rôle de garde-fou…
Avec ce type de raisonnement, la République se priverait donc d’alliés en cas de dérive du pouvoir. » Sébastien Fath

Ceux qui gèrent la cité ne peuvent tout régenter... « L’objet de la religion est différent de l’objet du politique. La politique n’est pas tout, et à ce titre, elle n’a pas à englober tout le reste. » S F.

Le vrai débat ( et le travail à faire ) reste celui des ''valeurs''... D'autant que ce terme semble inconsistant pour beaucoup... ! 
Le niveau des 'valeurs' est celui de l'Universel...

Ensuite, il peut être dangereux d'enfermer le bon sens dans un formalisme qui voudrait voir disparaître toute tentative d'interpellation, ou de subversion...

dimanche 19 avril 2015

Lecture : De la croyance à la foi critique – J. Moingt -29/99-

Marie, nouvelle Eve ou la mémoire du salut :

« S'il fallait s'en tenir à la critique historique ou rationnelle, aucune des doctrines mariales ne pourrait s'imposer avec quelque autorité : ... » ( p 576)
Mais … «  il y a peut-être une autre façon de relire ces doctrines ... » (p 577)

«  on ne rejettera pas non plus à priori tout ce qui en cette histoire porte la marque du temps et d'un apport culturel, on jugera au contraire que toute tradition ancienne, continue à travers le temps et répandue en tout lieu, transmet quelque semence de la foi des origines, et que le sens que lui reconnaît la raison dévoile quelque aspect de cette foi anciennement méconnu ... » ( p 577)
«  le récit de la conception virginale a bien été la source de toutes les doctrines mariales, ce qui les enracine au plus profond de la foi chrétienne, au cœur de la venue du Christ sur terre …. » ( p 578)

«  Peut-on garder la foi et donner sens à ces doctrines sans ériger la virginité physique de Marie en objet de foi ?» ( p 578)

Prendre un récit à la lettre … ? Non... ce qui est rapporté n'est pas le fait, mais l'annonce qui en est faite par un ange …
«  La foi n'est due qu'à Dieu et au Christ, non à Marie ... » ( p 579)
«  Pour le croyant, le mythe de la conception virginale de Jésus prend sens et devient révélation dans le mythe de la préexistence du Christ. » ( p 580)
«  Sa virginité est à comprendre au sens symbolique où prend figure en Marie la prédestination de l'histoire humaine à devenir en Jésus l'actualisation, l'être-autrement de la relation éternelle du Père au Fils dans l'Esprit, le ''pour nous'' de son éternité. » ( p 580)
« la vérité de cette virginité est le sens que Dieu donne à l'histoire humaine pour en faire une histoire de salut, c'est la présence voilée, et pourtant réelle, de Dieu à l'histoire... » ( p 581)

«  Le récit de la Visitation comme celui de l'Annonciation ont pour sens et pour fonction de rattacher l'histoire de Jésus racontée par les évangiles à l'histoire ancienne d'Israël pour en faire l'histoire continue du salut, l'histoire de Dieu avec les hommes ; ce ne sont pas plus des récits historiques que les récits de la Genèse, des patriarches ou des débuts de la royauté.. » ( p 581)
Une Bible illustrated by Rebecca Dautremer

«  le récit inaugural des Actes, qui « raconte » les quarante derniers jours de la présence de Jésus auprès de ses apôtres donne sens à leurs activités dans l'Eglise naissante en les rattachant à l'histoire de Jésus avec ses premiers disciples et en leur annonçant que la puissance de l'Esprit Saint viendra sur eux comme elle est venue sur Jésus lors de son baptême ; semblablement, les récits de l'enfance de Jésus sont le fruit de la relecture des Ecritures à laquelle Jésus ressuscité avait convié ses disciples, relecture qui avait pris la suite de la remémoration, à laquelle Marie s'était livrée tout au long de sa vie, des événements qu'elle avait vécues auprès de Jésus enfant, ou plus tard ... » ( p 582)

«  … en transférant et transformant ainsi un lien charnel en lien spirituel, Jésus donnait son vrai sens à la virginité de Marie... (..) Jésus devait être le Premier-né d'une ''multitude de fils'' qu'il appelle ses frères... (..) la virginité qui fait la gloire de Marie à ses yeux, comme il doit en être pour l'Eglise, est la fécondité spirituelle que la grâce donne à la nature. » ( p 583)
Une Bible illustrated by Rebecca Dautremer
«  Lus dans ce sens symbolique, les récits de la conception virginale de Jésus apparaissent comme la source légitime des autres dogmes mariaux, qui n'ont pas d'attache particulière dans le Nouveau Testament... » ( p 583)
Etc … etc … 
Le rapprochement entre Marie et Eve …

J Moingt continue, pour arriver au rôle des femmes dans l'Eglise primitive...
«  A la fin du siècle cependant, les presbytres retireront aux femmes le droit de parler dans les assemblées de prière ou d'instruction, parce que la parole, surtout chez les grecs, étaient un signe d'autonomie et de prééminence, qui choquait les hommes de la part d'une femme. » ( p 591)

Joseph Moingt termine ce premier Tome, par une transition vers le second : de l'Esprit-Saint à l'Eglise...
Achèvement de l'incarnation, et premier temps du salut... Le temps de l'Eglise est celui de la Présence vivante de Dieu Trinité dans l'histoire humaine... Le temps de la nouvelle création … Le temps où le Royaume de Dieu se construit dans l'invisible de l'histoire ( l’humanisation des hommes...)
«  la venue de l'Esprit est le mystère de l’habitation de Dieu dans l'homme.. » ( p 594)

«  La venue de l'Esprit fait donc la transition entre l’événement de Jésus, pris dans sa totalité, et la naissance de l'Eglise, comprise elle aussi dans sa totalité, en tant qu'elle est le corps dans lequel Jésus ressuscite du même mouvement qu'il est élevé à Dieu. » ( p 597)


«  Nous nous trouvons aujourd'hui dans un monde sorti de la tradition chrétienne et dans une Eglise désorientée par un tel bouleversement. Une nouvelle réflexion s'impose pour faire face à cette situation » ( p 603) – FIN du Tome 1

vendredi 17 avril 2015

Le regard fait l'image - Duane Michals

Duane Michals

Né en 1932 à McKeesport, Pennsylvanie (US) 
Vit et travaille à New York (US)



Comprendre l’art de Duane Michals nécessite de connaître ses origines. Ses parents tchèques (comme ceux de Warhol, son contemporain) lui transmettent très tôt la foi catholique tempérée toutefois par la magie et le mystère de la culture d’une Europe centrale fascinée par le non-sens. Autre fait marquant, son prénom est inspiré de celui du fils de la maison dans laquelle sa mère est employée. Ce modèle, cet éponyme riche mais jamais rencontré, va le marquer d’autant plus qu’il restera lointain et mystérieux (il se suicidera lors de sa première année d’université). Son obsession du double, sa fascination pour la mort, pour tout ce qui atteste des relations intimes dans un groupe ou une famille vient sans doute de là. À partir de 1966, il développe un travail photographique où la narration résulte de courtes séquences d’images mises ensembles. En 1974, ces séquences simples sont complétées de courtes sentences directement manuscrites sur le tirage. Ces œuvres appartiennent à ce registre particulier où l’irrationnel teinté d’une indéniable poésie construit d’étranges récits qui finalement interrogent la définition d’une identité humaine à l’heure de sa reproduction mécanisée.


Parmi ces premières séquences, on trouve une sorte de parabole, intitulée Le Paradis retrouvé (ci-dessous). Datée de 1968, elle se compose de six photographies, numérotées par l'artiste, de 1 à 6. De la première à la dernière, on retrouve le même cadre et les mêmes personnages, qui vont cependant subir une série de modifications. L'espace type d'un bureau, ainsi que les vêtements des deux personnages, sont donc les seuls éléments qui vont être modifiés au cours du temps. La pose des modèles reste identique, à l'exception de la position des mains de la figure masculine, qui varie dans les quatre dernières images. En suivant l'évolution de cette séquence, on assiste à la transformation de l'espace du bureau, progressivement envahi par la végétation, tandis que les modèles se trouvent peu à peu dépouillés de leurs vêtements.

Duane Michals, Paradise regained, 1968 
(Copyright Duane Michals, Courtesy Pace/MacGill Gallery, New York)
Le processus décrit ici dénote un retour à la nature ou, plutôt, l'envahissement par celle-ci d'un lieu de civilisation. Cette dite "civilisation" est en effet symbolisée par l'un de ses aspects à la fois les plus banals et les plus formatés: le lieu de travail, en l'occurrence un bureau. Cet espace fonctionnel, offrant un cadre et des outils standardisés, permet au photographe d'aborder la question de la condition de l'homme face au travail. Travail qui détermine non seulement son statut social, mais aussi ses relations aux autres. Le rapport de la figure masculine, présentée assise à l'avant-plan, à la jeune femme qui se tient debout, en retrait, illustre bien la notion de subordination hiérarchique, généralement présente dans le monde du travail.

On pourrait épiloguer longuement sur les thèmes abordés par cette séquence. Si l'on s'en tient à son titre, Paradise regained (Le Paradis retrouvé), ainsi qu'aux seuls éléments dénotés, ce qui est avant tout exprimé est un retour à l'état de nature, illustré par la végétation abondante et la nudité des personnages, et assimilé au paradis. L'expression de paradis retrouvé est également l'antithèse du "paradis perdu", titre du célèbre poème de John Milton, Paradise Lost, dans lequel le paradis correspond à la délivrance de l'humanité par la religion.


Cette séquence, qui figure donc parmi les premières réalisées par le photographe, présente toute une série de caractéristiques, que l'on retrouvera régulièrement dans les oeuvres à venir: la référence à la religion et à l'au-delà, ou encore l'évocation de textes littéraires; la méthodologie mise en oeuvre, consistant à travailler dans des lieux existants plutôt qu'avec des décors, en lumière naturelle et en noir et blanc, de même qu'avec des modèles qui sont le plus souvent des acteurs. L'effet de surprise engendré par le déroulement inattendu d'une action, redoublé par le fait que cette action est plus souvent subie par les personnages, plutôt que déterminée par eux, est aussi un élément récurrent, qui fait souvent en sorte que le spectateur a le sentiment d'assister à une scène à la frontière entre réel et irréel.


source: http://www.imageandnarrative.be/

mercredi 15 avril 2015

Lecture : De la croyance à la foi critique – J. Moingt -28/99-

Ensuite J. Moingt s'engage dans la même ( que l'incarnation: vrai Dieu, vrai homme) relecture sur le ''Salut '', avec l'inventaire des données ( conciles et Tradition..)
Salvation       - James Stewart -
Pour de nombreux chrétiens ( ou pas …) « ils ne savent plus de quoi ils ont besoin d'être sauvés, ou voudraient que Dieu, s'il existe, se préoccupe davantage de leur vie présente, ou parce qu'ils se sentent agressés par ce constant rappel du péché qui voudraient les maintenir sous la domination des prêtres, ou parce qu'ils ont appris que Jésus n'a jamais eu conscience d'être envoyé à la mort par un Dieu vengeur qu'il appelait son Père .... Aucune de ces motivations, ne pourrait servir d'excuse à l'abandon du langage de la Croix dont Saint-Paul a fait la base de son annonce de l'Evangile ( 1 Co 2,2)  » ( p 563)

« Le Salut n'est pas la vie éternelle au ciel auprès de Dieu, que Jésus n'a jamais annoncé formellement de cette façon, il est pourtant dans une intimité filiale avec Dieu, celle qu'il a connue sur terre, lui qui disait, même dans les temps d'épreuve, qu'il ne se sentait jamais seul car le Père était avec lui, et Jésus, alors même qu'il n'était pas reconnu par le monde, trouvait sa joie dans sa conscience d'être connu du Père …
Le salut n'est pas non plus dans le Royaume de Dieu, qu'il a annoncé mais qui n'est pas venu … mais différent, car c'est à nous de le construire … » ( p 569)

«  C'est par la mort de Jésus, que les hommes sont délivrés de la crainte de Dieu, qui les éloigne de lui, et reçoivent la révélation que Dieu est amour et non puissance dominatrice ni justice vindicative, puisqu'il abandonne Jésus à la mort pour être reconnu sous les traits de tout homme souffrant ... » ...  « et l'incroyant lui-même pour qui la mort de Jésus prend la signification de la mort de Dieu peut y trouver la salut, si relisant l’Évangile, il en vient à donner à sa vie un sens qu'il n'avait pas trouvé dans la croyance en Dieu... à savoir la conscience que la vérité de la vie est de s'aimer les uns les autres et que tel est le sens du salut. » ( p 570)


« l'universalité du salut ... »
«  la singularité de ce Dieu qui se propose à la reconnaissance de tous les hommes en renonçant à la toute-puissance dont se prévalaient les autres dieux pour éclipser l'autorité de leurs rivaux et s'attacher l'adoration de leurs fidèles. » ( p 570)
«  le Salut sera dû au fait que tous les hommes reconnaîtront Dieu pour Père en se reconnaissant tous frères... »( p 571)
«  le salut du Christ ne comporte pas de clauses, ni d'objectifs, ni de signes spécifiquement religieux ... » ( p 571)

«  il y a aussi une grâce qui découle de la création, comme le révèle le mythe de la préexistence du Christ et c'est pourquoi la grâce qui vient de la rédemption se porte par priorité au secours de la création... » ( p 571)

«  le salut n'est pas dans une différence religieuse, mais dans le service de l'universel humain... »

Pourquoi ce ''salut'' s'est-il ainsi réduit au cours des siècles, pour aujourd'hui intéresser si peu de gens … ?
Van Gogh - Cyprès et Cosmos
«  la cause première semble être la cessation de l'attente du Royaume de Dieu... Les chrétiens ne se sont plus préoccupés que de leur salut individuel, dont déciderait au dernier jour le souverain juge en fonction de leurs actes personnels, bons ou mauvais … Ainsi, le salut s'est désintéressé du cours du monde et a déserté le champ de l'histoire... » ( p 573)
«  … le salut est un tissu d'histoires individuelles entrecroisées par la grâce de la réconciliation de Dieu avec le monde en Jésus-Christ." ( p 574)
«  Ce qui ressuscite à la fin de la vie terrestre d'un homme, ce n'est pas la stricte individualité qu'il a reçue à sa naissance, c'est tout le développement historique qu'il lui a donné par ses relations avec les autres … Ce qui ressuscite en lui, c'est la portion d'histoire universelle qu'il a refaçonnée ... » ( p 575)

«  Ainsi, ce qui sera sauvé au terme de l'histoire terrestre de l'humanité, ce ne sera pas une multitude éparse d'individus, mais l'humanité entière, refaçonnée par l'histoire... » ( p 576)

dimanche 12 avril 2015

Marie, et le frères de Jésus

Dans l’hebdomadaire - ''La Vie'' du 26 mars – Régis Burnet, théologien et historien du christianisme, échange avec Françoise Chandernagor, qui publie un roman intitulé ''Vie de Jude, frère de Jésus''... Et, à propos de Marie ; je relève ses interventions ( ici, en italique):
Marie, Jésus et ses frères
« En tant qu’exégète, je ne peux que constater que les textes canoniques (Actes et Épîtres de Paul) affirment que Jacques est le frère du Seigneur. Et le mot frère – adelphos, en grec – n’a jamais signifié autre chose que frère. Il existe un autre argument de poids : la première communauté de Jérusalem fut dirigée par Jacques, puis ensuite par Jude, des gens qui sont de la famille de Jésus. On est face à une succession dynastique, et donc familiale » Régis Burnet, théologien.
« Au IVe siècle, à partir du pape Damase, la question est soulevée. Car un courant ascétique monte alors en puissance, qui conduira plus tard au célibat des prêtres. Le secrétaire du pape Damase, saint Jérôme, se retrouve donc en mission commandée pour trouver des arguments en faveur du célibat sacerdotal. Les attestations dans les Textes laissant supposer qu’une famille nombreuse existait autour de Jésus, Jérôme va s’atteler à une première interprétation de textes apocryphes qui offrent la thèse des demi-frères. Et c’est encore lui qui lancera l’idée qu’en Orient, on appelle frère un peu tout le monde : les Évangiles mentionneraient ainsi des cousins de Jésus, au sens large. Avec ces arguments, Jérôme rédige Contre Helvidius, le traité où il défend la virginité de Marie et sur lequel l’Église s’appuiera pour déclarer la virginité perpétuelle au concile de Latran, en 649. Mais Jérôme s’est trahi lui-même, car il existe une lettre qu’il a écrite après le Contre Helvidius, où il laisse échapper que Jacques est le frère de Jésus. »

La confusion entre frère et cousin (en grec adelphos veut dire le frère, et anepsios, le cousin) passe par l’idée que les Évangiles seraient des traductions de l’araméen, ce qui n’est pas vrai…
« C’est faux, effectivement. Ils ont été écrits directement en grec. » R Burnet

«  On distingue la virginité avant la conception, pendant et après. Mais si vous reprenez la formulation de foi, elle concerne la virginité avant la conception : c’est ce qui est dit dans le Credo. »

Penser que Marie n’est pas restée vierge après la naissance de Jésus ne remet donc pas en cause le Credo ?
« Le Credo, non. Mais la tradition théologique de l’Église, oui. Il faut bien comprendre que les affirmations dogmatiques sur Marie concernent en fait Jésus. La virginité avant l’engendrement, c’est une déclaration christologique, la nécessité d’affirmer que Jésus est le fils de Dieu. Par la suite, en lien avec la foi populaire, la « mariologie » a développé d’autres interprétations. Mais ce que je dois dire, c’est qu’on ne connaît Marie que par quelques allusions des textes canoniques. La tradition autour de Marie a été construite à partir de traces très limitées. On en a fait une héroïne assez peu maternelle, tournée vers le destin de son fils, une femme qui comprend tout et admet tout dès le début. Alors qu’elle a dû connaître aussi des moments d’angoisse. » R B.
Pierre, Jésus et son frère Jacques.
« Historiquement, on est certain que la communauté des débuts a prêché d’abord et avant tout le Christ ressuscité : c’est là-dessus qu’elle se fonde. .. on est passé progressivement d’une conception divine liée à la résurrection à une conception divine liée à la conception. » R.B.

Le rôle de La Tradition, n'est pas d'augmenter le corpus ( limité ) de l'Ecriture... Elle est d'éclairer la compréhension des Textes. Il n'est pas étonnant que l'éclairage qui correspondait, il y a dix ou quinze siècles, nous paraisse peu adapté à nos savoirs de ce XXI ème siècle... La pression populaire en faveur de la figure de Marie ( apogée au XIXe s.) , ne s'exerce plus avec les mêmes modalités... Revenons à la ''Résurrection'' et reconnaissons que l'argument gynécologique de Marie ''toujours vierge'', pour affirmer la divinité de Jésus, ne nous impressionne plus ...

D'ailleurs Benoît XVI, avait écrit dans son ouvrage ''La foi chrétienne hier et aujourd'hui'' Cerf 2005 (imprimatur donné en 1969 pour la version allemande), page 192 : « ...La doctrine de la divinité de Jésus ne serait pas mise en cause si Jésus était issu d'un mariage normal. Car la filiation divine dont parle la foi n'est pas un fait biologique, mais ontologique ... »  

jeudi 9 avril 2015

Lecture : De la croyance à la foi critique – J. Moingt -27/99-

Jusqu'au problème du '' vrai Dieu et vrai homme'' ...

A affirmer face « aux chrétiens qui admettaient que le Christ est à la fois Dieu et homme, mais pensaient, les uns, qu'il n'est pas absolument homme selon la condition commune de tous les hommes... » etc ( p 522)
«  L'Eglise … a cru et enseigné que Jésus n'était pas né à la façon de tous les hommes ... » ( p 522)

Pour J Moingt, la réponse passe par la ''préexistence du Christ''
A l'époque de Paul : « ils attendaient la venue du Royaume de Dieu dans l'avenir le plus proche » ... Puis, ils cessent de l'attendre dans la proximité des temps … alors les regards se reportent vers les ''commencements'' ( origine du Verbe)


Comment un lecteur moderne, peut-il aujourd'hui comprendre cette double identité... ?

«  Pour comprendre l'incarnation... si cet événement a une portée universelle, comme l'affirme la foi chrétienne, il n'est intelligible que sur fond d'histoire universelle, comme l'acte de Dieu de dévoiler ce qu'il donne à connaître de lui-même... » (p 527)
«  Si la formulation du dogme échoue à l'exprimer comme il le faudrait, parce qu'elle immobilise le langage officiel de la foi à un certain moment et dans un certain état, la réflexion théologique qui fait la tradition … pointe dans la direction qu'elle nous engage à suivre … l'extrême abaissement de l'amour de Dieu... » ( p 528)
«  L’incarnation, n'est pas un événement insolite de l'histoire, … un coup de force de Dieu … Elle suit le cours de l'histoire de la révélation de Dieu aux hommes, qui fait le cours de l'histoire humaine en en dévoilant le sens » ( p 530)
Peinture de  Carlos Roces

Je passe sur de belle pages sur la ''descente du Verbe de Dieu'' …

« L'incarnation est donc le terme provisoire de la logue descente de Dieu vers l'humanité, descente que l’Écriture appelle le temps de la ''patience'' de Dieu, et Irénée son ''accoutumance'' à fréquenter les hommes ... » ( p 535)

De la conception de « « Jésus » » à son ' identité ' J. Moingt développe tout ceci … Difficile à résumer … !
On en vient à la mention de la ''virginité de Marie'', « dépourvue de crédibilité historique » ( p 545)
«  Cette mention répond à l'intention manifeste de faire reconnaître Jésus en tant que Fils de Dieu ... » etc... Mais ceci est-il compris ainsi pour les esprits de notre temps … ?
Dans le jardin ... de Grace Carol Bomer

«Nous ne dirons pas que Jésus est Dieu, pour ne pas nier son humanité, ni qu'il est Dieu et homme, parce qu'il n'est pas Dieu par nature comme il est Dieu par nature, mais nous dirons qu'il est tout pénétré de la divinité de Dieu présent et agissant en lui, sans la posséder par et pur lui-même, qu'il en jouit comme d'un don reçu pour une tâche qu'il a encore à remplir, non comme s'il s'agissait d'une simple grâce, car Dieu l'a mis en charge de son Royaume, qui n'est pas réellement distinct de sa présence en nous ... » ( p 549)

«  Pouvons-nous dire désormais qu'il était ce Fils dès sa naissance à Bethléem ? Oui, si l'on s'en tient au projet de Dieu dès ce moment en voie de réalisation ; non, si nous réfléchissons que Dieu n'a pas pris Jésus pour fils de force , mais a attendu qu'il réponde filialement et en connaissance de cause à l'appel à la mission que Dieu lui adressait. » (p 550)

mardi 7 avril 2015

Lecture : De la croyance à la foi critique – J. Moingt -26/99-

Incarnation : histoire et historicité : ( p 490)
Jésus est-il devenu 'fils de Dieu' ou, selon la tradition de l'Eglise, l'est-il par génération éternelle... ? Jésus – selon nos textes, ne l'aurait pas affirmé …
Incarnation de Grace Carol Bomer
  • « L'Eglise définit l'incarnation comme le mystère de la naissance humaine du Fils éternel de Dieu qui ''assume'' en Jésus notre nature ...etc » ( p 491-2)
  • L'incarnation est passée par Marie, mais cela aurait pu se faire autrement … ?
Pour J. Moingt le concept trinitaire et le concept d'incarnation renvoient l'un à l'autre … ( P 492)
«  Le mystère de l'incarnation est de rendre visible ce qui est invisible par nature » ( p493)
J Moingt développe cette idée « stupéfiante que Dieu n'est pas resté dans se résidence céleste... » Il s'est fait l'un de nous... C'est bien la première fois que l'on parle ainsi de Dieu .. ! Le langage de la théologie construit donc des 'concepts' nouveaux : la Trinité, la préexistence du Christ ...etc

Question : aujourd'hui le monde s’intéresse t-il au mystère de Dieu fait homme … ? Ou, est-ce : le langage de l'Eglise qui n'arrive plus à être porteur de ce genre de ''nouvelle ''… ?

« - Le donné évangélique . Jésus avait-il conscience et a-t-il fait état devant ses disciples d'une relation à Dieu antérieure à sa naissance humaine, qui autoriserait à concevoir celle-ci comme l'incarnation du Fils préexistant de Dieu ? » ( p 497)
  • « Il est légitime de penser qu'il a pris conscience de sa mission en même temps que de l'intimité en laquelle Dieu le tenait, puisqu'il lui est arrivé d'être salué du nom de ''Fils de Dieu''
  • «  pour oser s'en réclamer et parler de Dieu comme il le faisait sans la garantie de l'institution religieuse et souvent en s'attirant des reproches... »( p 499)
Jésus et Marie-Madeleine, par Rébecca Dautremer. Une Bible, Philippe Lechermeier


Il y a bien sûr, le Prologue de Jean... :
  • Engendré éternellement ' fils du Père' .. etc
  • Il n'est pas dit du Verbe qu'il était en Dieu, mais à côté de lui … ni qu'il était engendré de lui …
  • etc … ( cf Pages 501..)

J. Moingt cite trois paroles de Jésus qui s'exprime en terme de préexistence :
  • « avant qu'Abraham fût,, Je suis. » ( Jn 8, 56)
  • «  cette gloire que j'avais auprès de Toi avant que le monde fût.. » ; et «  Tu m'a aimé dès avant la fondation du monde » ( Jn 14, 4-5. 24)
Comment interpréter cela … ? Il faudrait tout recopier … ! A lire donc ces pages : 503-504...

«  Ce n'était certes pas le langage d'un simple sage ou prophète, plutôt celui du représentant unique et ultime de Dieu, qui se sentait autorisé à parler en son nom parce qu'il en avait une connaissance singulière... » ( p 507)

«  - Le donné de la Tradition : » J. Moingt effectue le parcours des premiers conciles...
«  Sa résurrection a fait connaître qu'il était devenu dieu, mais pas encore qu'il l'était par origine... Elle montre le caractère divin du salut... » ( p 509)
Paul : la théologie de ''la Croix'' « Paul comprit et enseigna que la mort de Jésus dans l'humilité, l'obéissance et l'amour envers le Père était la source de la réconciliation de Dieu avec le monde, du pardon des péchés accordé aux baptisés et de l’habitation en eux de l'Esprit qui les unissait à Dieu en les tenant unis au Christ ressuscité... » ( p 510)

Plusieurs pages sur cette construction théologique qu’élaborent les Conciles, et qu'il est nécessaire de repenser ...

dimanche 5 avril 2015

Aujourd'hui


Sa résurrection n’est pas un fait relevant du passé ; elle a une force de vie qui a pénétré le monde. Là où tout semble être mort, de partout, les germes de la résurrection réapparaissent. C’est une force sans égale.

Pape François, Evangelii Gaudium 276



jeudi 2 avril 2015

Démythologiser la Bible -2/2-

Pour Rudolf Bultmann (1884-1976) - théologien allemand de tradition luthérienne – Il s'agit donc non pas de démythifier la Bible (ce qui serait le supprimer, comme le fait l'athéisme), mais de démythologiser, c'est-à-dire d'interpréter le Texte. Le mythe est, en effet, une « formation de compromis » entre le divin et l'humain. L'intention profonde du mythe est juste : il veut nous parler de Dieu. Mais – au fil du temps - il semble nous en parler mal, au point de dégrader l'invisible ( par le ''miracle'' par exemple ..!) …

Rudolf Bultmann s’est fait connaître par une conférence de 1941 au retentissement considérable : « Nouveau Testament et mythologie ». Champion de la démythologisation, Bultmann dépasse ce qu’il peut y avoir de déconstructeur dans la méthode historico-critique. Il propose, dans une démarche positive, une interprétation dite existentiale de la Bible.


" Attendre de l'homme du XXIe siècle qu'il donne son acquiescement intellectuel à des énoncés incompatibles avec l'image scientifique du monde, ce serait donc attendre de lui qu'il sacrifie l'exigence de cohérence entre ses pratiques, ses convictions théoriques fondamentales et la façon dont il se comprend lui-même ..."

" L'exigence moderne d'honnêteté intellectuelle rend donc inévitable la question herméneutique."

" Plus personne ne pense la transcendance de Dieu en termes de distance spatiale ( Dieu au ciel ); plus personne n'adhère à une image du monde en trois niveaux spatialement distincts; plus personne n'appelle un exorciste quand il rencontre un être humain allongé au sol et secoué de spasmes. En outre, la possibilité de distinguer entre une représentation (mythologique) et sa signification est devenue pour nous tellement naturelle que, le plus souvent, nous ne nous en rendons même plus compte; intuitivement, nous avons tendance à comprendre comme des symboles ou des métaphores telle ou telle affirmation des textes bibliques que Bultmann aurait qualifiée de ''mythologique''."

Dans sa conférence de 1941, « Nouveau Testament et Mythologie », le célèbre exégète et théologien allemand Rudolf Bultmann s’interroge sur les conséquences découlant du fait que le Nouveau  estament s’inscrit dans une conception mythologique du monde et de la vie. Cette conception n’est plus la nôtre. Le Nouveau Testament n’a-t-il dès lors plus rien à nous dire ? Contre cette position, Bultmann plaide pour une lecture qui le démythologise. Il montre que cette déconstruction de la vision du monde mythologique y est déjà à l’œuvre et que le travail de l’interprétation critique moderne reprend la critique du mythe par le Nouveau Testament. Dans un cours inédit de 1967, le philosophe Paul Ricoeur revient sur ce texte central en expliquant comment cette conception doit être reprise dans le cadre plus vaste d’une herméneutique générale. (*)

Herméneutique: prêter au Texte une vérité que la lecture doit reconstruire afin de permettre au lecteur d'y découvrir une possibilité de se comprendre, et de comprendre le monde dans lequel il vit.

Sources: (*) Nouveau Testament et Mythologie R Bultmann - P Ricoeur