mardi 31 mai 2016

Qu'est ce 'qui' en moi, ne craint pas la mort ? -2/3-


suite ...

5. Hylémorphisme 
Doctrine d'Aristote et des scolastiques selon laquelle l'être est constitué, dans sa nature, de deux principes complémentaires, la matière et la forme. Nous sommes des substances composées d’une âme et d’un corps : une âme humaine immatérielle qui est une « forme » faisant d’un corps un vivant humain. 
La forme n’existe qu’en tant qu’elle est forme d’une matière, ce qui ne signifie aucunement non plus qu’elles se confondent ou se réduisent à cette même matière. En ce sens, l’hylémorphisme ne peut s’exprimer dans les termes ni du dualisme, ni du monisme.
« Cette théorie n’oppose plus l’âme et le corps mais les articule comme deux fonctions indissociables. Le corps est aussi essentiel à la vie spirituelle que l’âme à l’incarnation, cette relation est au cœur même de l’humanité de la personne. (I Th 5, 23) » Eglise Catholique

6. Animalisme 
Nous sommes des organismes biologiques particuliers, des animaux rationnels. Dès lors, nous sommes des choses matérielles. 
Le matérialisme métaphysique est un point de vue qui soutient que la nature de notre monde est entièrement matérielle. Ainsi, selon cette thèse, toutes les choses sont composées de matière et tous les phénomènes sont le résultat d’interactions matérielles. 
Peter van Inwagen (21 septembre 1942 - ) est un philosophe analytique américain, sa thèse animaliste est compatible avec un matérialisme chrétien. Cette conception affirme que, si nous sommes des êtres matériels, tout n’est pas matériel. Notre créateur, Lui, ne l’est pas.

7. Quadridimensionnalisme 
Toutes les choses qui existent sont quadridimensionnelles ; elles ont des parties spatiales et des parties temporelles. Dès lors, comme toutes les autres choses, nous somm
es des sommes de parties temporelles. « Pour toucher toute une personne, vous devez l’étreindre dans une interpénétration totale s’étendant de sa naissance à sa mort ; c’est seulement alors que vous avez accès à toutes ses parties temporelles passées et futures », affirme Theodor Sider. 
Certaines des parties temporelles de la personne se situent après sa mort. La mort est la fin d’une mi-temps....

8. Irréalisme psychique 
Nous n’avons aucune réalité substantielle, qu’elle soit physique (être un organisme biologique) ou mentale (être un esprit), et nous sommes alors des concrets particuliers pratiques constitués d’états ou d’événements mentaux qui se succèdent rapidement. Certains passages du Traité de la nature humaine de Hume suggère une thèse de ce genre, particulièrement la section consacrée à l’identité personnelle (I, IV, VI). Que nous soyons « pratiques » signifie qu’on peut faire référence à nous grâce à notre nom, à un statut social, à des activités qui laissent des traces, etc. Nous serions des êtres sociaux, tout comme une université ou une entreprise. 
Le libre-arbitre, est l’une de ces histoires que nous nous racontons au sujet de notre identité...

9. Nihilisme 
Nous n’existons pas. Il n’y a que des particules élémentaires. « La perspective scientifique qui se développe, et qui est en passe de l’emporter en biologie et en chimie depuis les derniers siècles, rend au moins fort vraisemblable qu’il n’existe aucune personne ou aucun être fini », dit Peter Unger. Une cellule de plus ou de moins ne fait pas de différence pour mon existence. Enlevons-en une et je suis toujours là ; encore une autre ; cela ne fait toujours pas de difficulté. Finalement, il n’y en a plus du tout. Je suis toujours là, non ? Dans une perspective scientifique, et pour celui qui prend au sérieux l’argument du sorite, c’est absurde. Mais c’est en réalité la supposition de mon existence qui est absurde ! 

Sources : (*) Roger Pouivet est Professeur de philosophie à l’Université Nancy 2 et Directeur du Laboratoire d’Histoire des Sciences et de Philosophie-Archives Poincaré (CNRS, UMR 7117). ''Métaphysique de la résurrection des corps.''

A suivre ...

samedi 28 mai 2016

mercredi 25 mai 2016

Qu'est ce 'qui' en moi, ne craint pas la mort ? -1/3-


Qu'est-ce que l'humain... ?
Qui suis-je.. ?
Question fondamentale, pour celui ( celle) qui s'interroge sur sa vie et son sens, sur la mort...

Je pense, donc il y a une chose dont je suis sûr : ''je suis''... En moi, quelque chose ''pense'', et cette activité a t-elle une réalité substantielle ?

* Il s’agit de savoir si la pensée repose dans une substance, que l’on peut appeler ''âme'' ou ''esprit''... dans ce cas, on dira que le monde est composé de deux types de substances totalement distinctes, ne possédant aucune qualité commune ; on sera alors ''dualiste''.

** Alors se posera la question cruciale de l’interaction de ces deux substances, question de l’action de l’âme sur le corps et inversement.


Mais, si la pensée n'est qu'un effet, causée par autre chose qu'elle, par exemple la matière, on sera moniste, et matérialiste... A moins que l'on affirme que la seule substance est l’esprit ; tel est par exemple ce qui est soutenu par la doctrine dite immatérialiste... Attention, des pensées peuvent tenter de dépasser l’opposition de la matière et de l’esprit....

Le chrétien ne peut faire l'impasse de ce questionnement ; si ce n'est déjà pour répondre à une autre question liée à la 'foi' d'une vie après la mort, et à la 'foi' en « la résurrection des corps »... !

Parler de la résurrection... Pourquoi pas... Mais, qu'est-ce qui ''ressuscite'' ?
Il me semble nécessaire de répondre d'abord à cette question :

Que sommes-nous ?

Roger Pouivet (*) , nous propose neuf réponses possibles, au travers de neuf conceptions... ( je résume...) ... Choisissez la vôtre... Ou en avez-vous une autre ...?

Accrochez vos ceintures, c'est un voyage en ''Anthropologie-Fiction ''

1. Immatérialisme ( par exemple avec l'évêque irlandais George Berkeley (1685 - 1753)) 
« Nous sommes des âmes, des substances immatérielles. Ces substances existent par elles-mêmes ; pour exister, elles ne dépendent en rien d’autre chose. L’âme est méréologiquement simple, elle n’a pas de partie propre, pas même de parties immatérielles la composant. L’immatérialisme refuse unilatéralement l’existence de la matière. Nous n’avons aucune propriété physique ; les corps et leurs propriétés physiques sont des complexes de qualités sensibles pour un esprit. » 

Ce morceau de pain n’existe pas en dehors de sensations qu’il me procure. Ce qui existe, c’est ce qui est perçu par moi, c’est-à-dire un ensemble de qualités sensibles relatives au sujet. 

2. Dualisme 
Nous sommes composés de deux substances, l’une immatérielle (et simple), l’autre matérielle (étendue et divisible). Mais ce que nous sommes vraiment est une âme ou un esprit. L’âme et le corps interagissent ; peut-être doivent-ils même être pensés en termes d’union. Dès lors, tout ce qui arrive à mon corps, m’arrive aussi à moi qui suis une âme. L’immortalité de l’âme peut être considérée comme un processus naturel, comme chez Platon. Je survis à la destruction de ma partie matérielle, puisque rien ne peut détruire l’être immatériel et simple que je suis.

La mort est un changement extrinsèque ; elle est synonyme de libération. Ma survie est le cours naturel des choses, une propriété de mon âme. 

Cette théorie a fasciné certains Pères de l’Église, comme Grégoire de Nysse, et taraude encore certains philosophes chrétiens, comme Richard Swinburne( 1934- ), John Hawthorne ou Alvin Plantinga.

3. Constitutionnalisme 
On abandonne alors le dualisme entre l’âme et le corps, tout en conservant le principe d’une dualité entre la personne et le corps. Pour une théorie de la constitution, nous serions constitués par un organisme humain, mais nous ne lui serions pas identiques. 

Dieu, un ange, une personne, qu’elle soit humaine ou non, bionique, martienne ou autre, a essentiellement une perspective en première personne. Cette perspective fait d’elle un sujet dans un monde de choses différentes d’elle. Elle n’est pas simplement consciente, en ayant des états psychologiques, mais elle a cette perspective en première personne. Un organisme a essentiellement des fonctions biologiques. Dès lors, une personne peut être constituée par un corps organique. Mais il peut y avoir des personnes immatérielles, qui ne sont pas constituées par un corps organique – comme les personnes divines. La relation de constitution unit des choses dont les propriétés essentielles sont différentes. Les personnes humaines n’existent pas sans corps et les personnes humaines sont constituées par le corps qui est l’objet de leurs pensées en première personne : « J’ai mal aux dents » ou « Je me demande si je peux encore bouger le pied ». 

Une personne n’a cependant un corps que de façon dérivée (ou secondaire) ; en revanche, elle a essentiellement une perspective en première personne. 

4. Fonctionnalisme
Tout ce qui manifeste un ensemble de fonctions dans ses relations causales avec son environnement peut être dit avoir un esprit, qu’il s’agisse d’un système nerveux ou de quoi que ce soit d’autre, pour peu que sa structure lui permette d’avoir ces fonctions. Que l’instanciation des fonctions soit le fait d’une substance immatérielle ou d’une chose physique importe peu quand l’esprit est en gros identifié à un programme d’ordinateur. 


Sources : (*) Roger Pouivet est Professeur de philosophie à l’Université Nancy 2 et Directeur du Laboratoire d’Histoire des Sciences et de Philosophie-Archives Poincaré (CNRS, UMR 7117). ''Métaphysique de la résurrection des corps.''
A suivre … 

dimanche 22 mai 2016

Le ''Koan'' de la ''Résurrection de la chair''

La ''résurrection de la chair'' est considérée par St-Paul d'abord, et dans le christianisme ensuite comme la ''doctrine'' essentielle : sans elle notre foi serait « vaine »... ! Un enseignement difficile à entendre … !

Déjà à l'époque de Paul, les grecs à l'entendre parler ainsi le renvoient gentiment, « nous t'entendrons sur cela, une autre fois ... » !
Je ne peux me résoudre à considérer cette conception, comme aberrante et sans signification... Mieux, je considère la ''résurrection de la chair'' comme un koan.

Le koan (du zen japonais millénaire) n'est pas une devinette, ni un mot d'esprit : c'est une courte histoire ou une proposition qui travaille avec un paradoxe de sagesse, pour en faire jaillir une évidence inaccessible à la seule intelligence.


Voici, un exemple de koan, qui renvoie d'ailleurs à une parole de Jésus : le koan de Bashô : À un moine qui lui demande ce qu’est le zen, il répond : « Si tu possèdes un bâton, je te donne un bâton, si tu ne possèdes pas de bâton, je t’enlève ce bâton ! » 
Et, donc...
« Car à celui qui a, il sera donné, et il aura encore plus; mais à celui qui n'a rien, cela même qu'il a lui sera ôté » ( Mat 25, 29)


Pour en revenir à la ''Résurrection de la chair'', ce 'koan'  nous questionne sur la ''chair '' de l'humain... Qu'en est-il avant la mort, et après la mort... ?
Le fil d'une existence

L’Ame qui a forme humaine
dédaigne le démon et
suit celui à qui elle ressemble :l‘Ange. 
L'âme immatérielle, n’a pas besoin d’ailes.
En quoi consiste mon identité si je dois ressusciter ? Si la résurrection retient mon identité personnelle mais pas la particularité de mon corps ( périssable) , peut-on parler de résurrection de la chair ? Notre existence serait-elle intermittente, partagée entre deux vies séparées par la mort ? Et, si je suis mon corps ; que devient-il... ?

« Dans l'anthropologie biblique, l'homme est une âme vivante. L'homme est créé âme vivante. L'homme est aussi appelé "chair", mais ces deux termes visant une seule et même chose : l'homme vivant, concret, l'homme dans sa structure biologique et psychique conjointement. »
Claude Tresmontant - "La métaphysique du christianisme et la naissance de la philosophie chrétienne" (p. 577)

Pour Saint-Irénée, la divinisation ( la theiôsis) de l'homme, réclame une création progressive : l'humain est créé inachevé...


Au XXIème siècle, l'ontologie humaine, questionne la philosophie. Il serait dommage que chrétien ou non, nous en restions aux vieux schémas : par exemple celui de l'humain constitué d'un corps et d'une âme...
Donc... A suivre:

jeudi 19 mai 2016

Les dessins d'Abner Dean (1910-1982)

Abner Dean (1910 - 1982), (né Abner Epstein), était un Américain caricaturiste.

Dans des situations allégoriques ou surréalistes, Dean dépeint souvent les extrêmes du comportement humain en milieu 'hostile' : des milieux urbains décomposés ou des paysages arides.



Le travail de Abner Dean, ici, dépeint le plus souvent des personnes dévêtues dans une variété de situations absurdes. Les thème abordés sont : la désillusion, l'auto-illusion, le désir et l'absurdité de la vie moderne . 
Les activité de ces personnages révèlent toutes sortes de choses sur eux-mêmes, la folie semble les guider... et quand ils agissent en groupes, il semblent sous le contrôle d'une force collective …
Le travail de Dean exprime une vision inquiétante et atypique pour son époque …



















lundi 16 mai 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-7/.-

L'hypothèse chrétienne est que ''Dieu'' ( dont on ne peut rien dire …) est entré dans l'univers créé, s'est incarné avec Jésus ( le Verbe). 

J'ajouterai que ce Verbe – La Parole – est traduite ( humaine et maladroitement) en quatre versions ( les Evangiles), et non pas en un Livre dicté par Dieu.. le christianisme n'est pas une religion du Livre, il est une religion de La Parole (vivante) et non figée dans un ''livre'' ...
Jésus enseigne à la manière d'un maître ''éveillé'' , dans un langage mystique et paradoxal..








Le thème central du christianisme est sa résurrection. « Que Jésus ait vaincu la mort est peut-être le message chrétien le plus important. »

C'est en zen, ce que l'on nommerait le '' Koan de la mort ''. Jésus dit qu'il a triomphé du monde, précisément au moment où il sait que sa mort est imminente ( Jn 16, 16-33)
Self-Portrait, 1912 by Otto Dix


La mort est un tabou dans notre culture, et tous les efforts sont dirigés pour combattre cette loi de la nature. Mais, peut-être, y a t-il un ''bon côté'' de la mort.
La mort est à la fois à la racine de notre anxiété existentielle et son ultime remède.

Dans la parabole du ''Maître exigeant''( Mt 25, 14-30) Jésus pointe notre attachement à cette vie, sans risquer de la perdre … alors que nous allons la perdre, de fait !... Le serviteur prudent a correctement compris que la vie est pleine de risques, mais il en a tiré une mauvaise conclusion...

C'est un fait que la vie est à la fois ''tragique'' et magnifique... Accepter que nous ne pouvons pas contrôler l'existence, conduit à la liberté intérieure..
Assumer l'insécurité, consentir à la mort...

Le Divin s'incarne pour remonter, il ne peut y avoir d'ascension, sans descente

vendredi 13 mai 2016

Alexey Kondakov - Histoire de l'art


L'artiste ukrainien Alexey Kondakov projette dans le monde contemporain des personnages peints et 'classiques' et les fait vivre à nouveau dans les rues de Kiev, sa ville natale...

Cette série est intitulée ''Art history on contemporary life'' (L’Histoire de l’art dans la vie contemporaine). Ce mélange de peintures et paysages urbains est opéré avec Photoshop.
Se confrontent alors la perfection formelle de l'art classique et les banlieues urbaines bâclées et dégradées...
Les œuvres sélectionnées sont celles des grands peintres: Caravaggio, Hayez, Hans Holbein, avec une préférence pour William-Adolphe Bouguereau






" Le Chant des Anges " (1881) par exemple , est transposée dans une voiture de métro, où la Vierge Marie et l'enfant sont entourés par des anges qui deviennent des musiciens de rue;





" La jeunesse de Bacchus " (1884) transforme les personnages mythologiques dans un groupe d'amis visiblement ivres qui traversent un passage souterrain pour continuer la soirée alcoolique;





Le '' Satyre avec Nymphes " (1873) devient une scène animée de séduction à bord d'un tram.





Une sorte de vie quotidienne des dieux … Et ces ''êtres '' qui visitent notre réalité, nous révèle une humanité commune qui nous lie tous, et qui transcende les âges.