vendredi 29 juillet 2016

La dame, le chevalier et l'amour courtois. -2/2-


Le Moyen-âge favorise un mode de vie plus raffiné, plus élégant, où la place de la femme noble permet des attitudes nouvelles que l'on désigne par « courtoisie », et chantées par les troubadours et trouvères. Aliénor d'Aquitaine va apporter avec elle ces idéaux et habitudes courtois ; ainsi que ces deux filles, Aelis de Blois et Marie de Champagne (protectrice de Chrétien de Troyes).

Les principes de la courtoisie :

Dans la relation amoureuse, c'est la dame qui est en position de maîtrise et c'est l'amant qui, entièrement soumis, la supplie de lui accorder ses faveurs. La mysogynie du temps, saura jouer de cette règle...

Il est admis que si le véritable amour doit rester platonique, une relation de ce genre peut comporter un certains nombre de faveurs sexuelles …
Les troubadours chantaient l’échelle progressive des faveurs de la dame, du regard au « don de merci », en passant par le baiser et, juste avant le stade ultime, l'asag ( ou essai) , au cours duquel l'ami devait passer une nuit avec sa dame, « nu à nue », sans pour autant aller plus loin, afin de manifester sa maîtrise sur son désir …


Bien sûr, seules peuvent être objet d'amour, des dames également nobles ; celles qui ne méritent pas ce sentiment, peuvent être moins bien traitées.

Avant qu'on en arrive à un code plus raffiné, selon lequel toute jeune fille ou toute femme doit recevoir de tout chevalier aide et protection, les chevaliers errants ont tendance à se dédommager des épreuves que leur infligent leurs dames courtoises implacables, en troussant sans le moindre scrupule les pastoures qu'ils rencontrent sur leur chemin.... Et, évidemment aucune dame digne de ce nom, n'accorderait ses faveurs à un vilain.

L'amour courtois, ne concerne pas l'amour conjugal. 
Le secret est nécessaire, il est renforcé par la menace des individus « non courtois ». 
De plus ce rapport illégitime est condamné par l'Eglise, et une partie de la société. La loi donne au mari trompé, le droit de répudier sa femme, voire de la tuer ainsi que son amant. ( voir la triste histoire du troubadour Guillaume de Cabestaing).

Sources : « Le roman courtois » d'Anne Berthelot.


La cour imaginaire du roi Arthur dans les romans de la Table Ronde devient le modèle idéal des cours réelles : non seulement le chevalier est brave, mais il a en plus le désir de plaire ; parce que les femmes sont présentes, le chevalier doit avoir des attitudes élégantes, des propos délicats. Dans le service d’amour, pour plaire à sa dame, le chevalier essaie de porter à leur perfection les qualités chevaleresques et courtoises : il doit maîtriser ses désirs, mériter à travers une dure discipline l’amour de sa dame. Cet idéal est bien celui des gens de cour.

mardi 26 juillet 2016

Ballade contée au Moyen-âge -3/.-

Gui de Hauterive, est un fidèle d'Aliénor.. Il l'a rencontrée pendant la 2ème croisade, alors qu'elle accompagnait son mari , Louis VII, le roi de France...
Gui de Hauterive est revenu vivant, donc couvert de gloire... !
Quelque temps après son retour, dans son pays limousin, Aliénor se remarie avec le futur roi d'Angleterre, Henri II Plantagenêt...
Et, Gui de Hauterive affirme sa loyauté au Roi d'Angleterre ; et comme il doit assurer sa lignée, il souhaite se marier... Il demande à ses suzerains, de lui proposer une épouse... Comme son lointain cousin Adémar V, Vicomte de Limoges vient de le faire... En effet, Henri II, lui fait épouser Sarah, sa propre cousine, fille de Renaud, Comte de Cornouailles.

Gui de Hauterive, en présence d'Aliénor, épouse à Poitiers, Emma de Crèvecœur ( Seigneurie de Leeds dans le Kent). La jeune femme ( elle a bien vingt ans de moins que lui...), est très belle … A cette époque, être belle : c'est être blonde, le teint clair, diaphane et avoir un long cou ...
Elle a grandi dans l'environnement d'Aliénor... Elle aime danser, écouter de la musique …
Aussitôt installée dans son château, elle organise une vie bien différente de celle qui régnait jusqu'à présent …

Gui de Hauterive est un guerrier aguerri, qui n’apprécie vraiment que la bataille et la chasse... Sa maison est commandée par un capitaine des gardes, son ancien écuyer, celui-là même qui l'accompagnait pendant la croisade … Et le soldat n'apprécie guère le changement d'ambiance …

Dame Emma, invite les troubadours, reçoit les hommages de jeunes chevaliers en quête d'aventure, tel notre Guillaume. Elle fait organiser des tournois... Tous se disputent, pour porter ses couleurs …
Et, grande nouveauté : Dame Emma préside une cour d'amour... Comme Aliénor, comme Marie de France...
On y discute poésie, mais surtout on soumet à ces réunions des questions de morale chevaleresque, puis des questions de personnes ; ainsi la Dame de Hauterive a traduit l'une de ses voisines dont l'ami de cœur était parti, voilà deux ans, en croisade et songeait à le remplacer … La cour statua '' qu'une amante ne doit jamais abandonner son amant pour cause d’absence prolongée "… Un seigneur, était fort jaloux et empêchait son épouse de remettre sa manche à un chevalier afin qu'il se batte pour elle... Et bien, belles dames, jongleurs et troubadours de la région ont boycotté les fêtes données par ce seigneur, jusqu'à ce qu'il cède …

Dame Emma voyage.. Par exemple, elle se déplace jusqu'à Limoges pour visiter sa compatriote Sarah de Cornouailles... Elle se déplace protégée par des chevaliers... Les valises d'aujourd'hui sont remplacés par un coffre ; meuble indispensable dans la chambre d'une dame ….
Guy de Hauterive a du mal à suivre et à apprécier les désirs de sa jeune femme … Il ne manque pas de lui exprimer sa mauvaise humeurs quand des jeunes chevaliers attirent son attention …
Son seigneur est jaloux, mais la dame n'en a que faire … !

Et bien ce jour là, alors que la belle Emma est de retour de Limoges... Le capitaine des gardes, le fidèle compagnon de Gui de Hauterive, lui demande dans l'urgence de pouvoir l’entretenir, en privé .. !
- Il soupçonne sa femme, la dame de son seigneur, d'avoir caché dans le coffre, son amant... !

Gui de Hauterive est sonné... Puis, la colère monte... Il veut en avoir le cœur net ; et se rend dans la chambre de sa femme.
Elle y est seule, surprise par cette entrée fracassante … Le coffre est là...
Emma n'a pas de peine à se rendre compte que son mari est rempli de colère... Une colère de jaloux … , qu'elle finit par bien connaître!
« Dame Emma, ouvrez ce coffre... »

Emma, retire la clef qu'elle porte autour de son cou …
« Mon ami, votre colère vous fait imaginer qu'un homme est caché dans ce coffre … N'est-ce pas... ? … J'imagine, que la parole de votre dame, ne vous suffit pas … ?

« Alors, Mon Seigneur, puisque tel est votre volonté... Prenez la clef et ouvrez ce coffre ….
Mais, avant réfléchissez bien … »

« - Si ce coffre contient un homme, vous serez blessé dans votre amour-propre, vous devrez le punir, peut-être le tuer ; et moi, vous me perdrez à jamais... Et peut-être aussi, votre alliance avec les Plantagenêt...

- Si ce coffre est vide d'homme, vous aurez blessé mon amour-propre, tué mon amour pour vous, et bafoué la parole de votre dame ; vos chevaliers - même - vous le reprocheront...

Le seigneur hésite...
Peut-être aime t-il sa belle et jeune femme.. ? Peut-être pense t-il à la puissance de son suzerain... ?
Il ne prend pas la clef...
Il regarde le coffre... Il sourit à sa femme
« Vous avez raison ... »

Le seigneur sort de la chambre ; et donne des ordres pour que l'on en surveille portes et fenêtres …
Il réfléchit, puis il donne l'ordre
« Que l'on prenne le coffre de la chambre de ma femme, et qu'on l'enterre dans le fond de ma propriété. »
Ce que l'on exécute dans l’instant …
« Ma bien aimée femme, je trouve que ce coffre ne vous méritait pas … Je vais à l’instant vous l'échanger par un bien plus précieux ... »

De ce jour, chacun semble en avoir tiré la leçon. Le seigneur Guy à décidé de prendre en avantage les hommages des chevaliers à sa femme. Et Dame Emma, reste discrète et dévouée au service de la gloire de son époux...

Guillaume décide lui de relever le défi lancé par son ami troubadour...

dimanche 24 juillet 2016

La dame, le chevalier et l'amour courtois.-1/2-




Avant toute incursion dans le Roman, la féerie, l'amour courtois...

- Il faut reconnaître la place de la femme dans la société féodale.
Aux alentours du XIe s. la femme occupe une place inférieure. Elle est une éternelle mineure, et passe de la tutelle de son père à celle de son mari, ou même en cas de veuvage à celle de son fils, de son frère ….

La seule manière pour elle d'échapper à ce sort est de se faire nonne dans un couvent, mais, même si les abbesses ( bien dotées …) disposent d'une certaine indépendance, elles sont sous l'étroit contrôle d'ordres masculins.

La femme n'a à peu près aucun droit sur le plan juridique, mais on la considère comme une créature dangereuse, qu'il faut surveiller de près pour l'empêcher de succomber à la tentation, ou d'induire des hommes innocents en tentation …




Les femmes de la noblesse aspirent à plus de liberté, elles l'expriment ou le font exprimer au travers des romans courtois.
Dans les fabliaux, les farces ; la femme y apparaît plus négativement ( la vilain de Bailleul de Jean Bodel, ou la farce nouvelle de Garin …), avec la crainte d'une revendication féministe …
On y décrit aussi une vie « ménagère » moins réjouissante … On pourrait également évoquer le thème de la mal-mariée ...


- D'autre part, la société est fondée sur des qualités guerrières ( et donc la force …) et la féodalité sur sur une pyramide, avec au sommet le roi. Le seigneur protège les populations qui dépendent de lui, et sert son « suzerain ». La condition économique de simple chevalier est parfois difficile.


Un seul fils hérite de son père, et pour éviter qu'un fief soit partagé, seuls le fils aîné est autorisé à se marier. 

Beaucoup de chevaliers sont entretenus par le seigneur, et n'ont que peu d'espoir d'acquérir un jour un fief et une épouse … !


- Tout naturellement, ces chevaliers rêvent de la seule femme noble qui se trouve dans leur entourage, la « dame » de la cour, à laquelle ils doivent respect et obéissance … Avec la dame , le rapport féodal s'exprime à travers le code amoureux, et vice versa, : l'amour que l'on dit courtois reprend les formes et le vocabulaire de la féodalité.


Si servantes et vilaines ( paysannes) sont des proies faciles ; dames et demoiselles sont inaccessibles : objets de l'adoration la plus fervente, mais intouchables.... 


Eglise et suzerains, veillent aux principes de la religion ; l'éventuelle naissance de bâtards renforcent l'interdit ...
Le chevalier « non fieffé », célibataire, est donc soumis à une tension qu'il va sublimer dans la notion de fin'amor, selon laquelle la degré le plus extrême de raffinement de l'amour est le contrôle du désir et le report constant de la satisfaction...


Sources : « Le roman courtois » d'Anne Berthelot.

mercredi 20 juillet 2016

Ballade contée au Moyen-âge -2/.-

C'est l'histoire de Guillaume, chevalier riche en bonnes qualités, mais pauvre d’avoir. En quête de l'amour d'Ermengarde, il arrive bientôt sans doute à force de ''courtoisie'' et d'astuce à se faire remarquer de la fille du seigneur de Lasnours... ( histoire édifiante que je vous raconterai une prochaine fois...).
Ensuite, ...Quand le père voit les visites du chevalier devenir trop fréquentes, il défend à sa fille de lui parler et le reçoit lui-même avec une froideur si marquée, que le favori de la demoiselle n’ose plus revenir.

Guillaume s'en ouvre à son ami, Bertran, compagnon de ripailles, et expert dans l'art de séduire les plus belles dames … Pour cela Bertran trouve les mots et la musique, et se fait donc appeler ''trobador''. Il se vante d'affoler les amants, les femmes et les époux et va, disant que si les maris deviennent jaloux et que les dames sont dans l'angoisse, c'est que l'amour va de travers... Et le mieux à faire, c'est de l'écouter et l'entendre.
Aussi, fort de son expérience, Bertran, déconseille à Guillaume de poursuivre cette aventure.
Car enfin … ! Pour un chevalier, la belle aventure, le haut fait dont aujourd'hui on peut se vanter, c'est : - plus que d'avoir remporté le prix d'un tournoi – plus que d'encliner ( fotre) une demoiselle.. C'est … C'est attirer dans ses bras... une fée !
Une fée ? Oui, le haut fait : c'est de s'emparer de la femme, de toutes la plus sévèrement interdite, c'était bravant les terribles châtiments promis à l’adultère et au félon, ravir la dame, l'épouse du seigneur. Double forfait certes. Mais éclatante démonstration de hardiesse, le plus envié des titres de gloire... !

Lui-même Bertran, a rencontré récemment, le bel écrivain chargé d'écrire l'éloge du fameux Guillaume le Maréchal ( 1145-1219) , et ce lettré rapporte que les rivaux de son héros l'ont accusé d'avoir séduit l'épouse de leur commun seigneur, Henri de Plantagenêt, le roi.
Cette épouse n'est rien de moins que la belle Aliénor. L'auteur de la chanson ne cherche pas à disculper Guillaume, il ne confirme pas non plus le fait. Mais ce que Bertran a retenu c'est que Le Maréchal, ce parfait chevalier, alors célibataire, a laissé lui-même planer le doute, fier que cette insigne prouesse ait pu lui être attribuée.
Guillaume n'en croit pas ses oreilles... Il doute encore.
Bertran lui fait entendre, que la dame est l'honneur de son seigneur. Elle fait sa gloire. C'est pourquoi il la couvre d'ornements et l'expose.

Dans le lai de Graelent, que Bertran se promet de lui conter ce soir même ; le grand roi Arthur, chaque année, le jour de la Pentecôte, fête du printemps et de la chevalerie, avait établi une coutume bien singulière. Il faisait monter la reine sur une estrade; puis on lui ôtait son manteau, afin de pouvoir admirer à son aise l'élégance de sa taille et de ses formes. Le monarque s'adressant ensuite à l'assemblée, leur disait : Seigneurs barons, que vous en semble? Avez -vous jamais vu sur terre une aussi belle reine?
La beauté de la reine, la séduction qu’elle peut exercer sur les vassaux, est simplement l’un des attributs, l’un des modes d’exercice de la puissance royale.


«Ne crains pas Guillaume, Le désir et le service d'amour ne viennent-ils pas ricocher sur la personne de la dame pour se porter sur celle du seigneur. ?
Je sais, mon ami, combien grande est la reconnaissance que tu dois au seigneur de Hauterive... Aussi, mon conseil serait de garder tes passions, pour les tourner vers sa dame, Emma de Hauterive … On la dit belle, gentille, gaie, plaisante et très désireuse de prix et d'honneur ; elle n'a pas grandi dans la cour d'Aliénor pour rien … !
Crois-moi, mon ami, il vaut mieux traiter avec un mari même jaloux, qu'avec un père gardien de sa fille … !  Ensuite quand tu auras fait tes armes, et gagné le cœur de celle dont tu auras fait ta reine. C'est elle qui portera jusqu'au grincheux seigneur de Lasnours, ta demande pour marier Ermengarde. Et lui, sera tout honoré de te prier d'accepter la main de sa fille …

Guillaume est convaincu par ce dernier argument, et le passage par la quête de la dame de Hauterive, ne lui déplairait pas s'il ne connaissait pas l'histoire que l'on raconte à son propos … C'était l'année passée, alors qu'il venait d'être adoubé chevalier par Guy de Hauterive, et qu'il le servait encore...

Vous ne connaissez pas l’histoire du coffre de Dame Emma ?
A suivre ...

dimanche 17 juillet 2016

Ballade contée au Moyen-âge -1/.-

Nous allons commencer cette série, plus exactement cette ballade contée, en passant sous la Poterne, une ancienne porte fortifiée du château médiéval du seigneur de Lasnours,
Quand nous l'aurons passé, nous serons loin … Nous serons il y a plus de huit cent ans ...
Mais, soyons attentifs … Cette porte, discrète, que nous voyons encore aujourd'hui, était en cette époque éloignée du grand passage, et un lieu de rendez-vous des amoureux ...

* On aime raconter que Janeton, une jeune bergère, pressée de rencontrer le prince charmant pria la ''Bonne Mère'' d'exaucer sa prière, mais la vierge ne répondît pas. Rouge de colère, Janeton lança des cailloux vers la statue, le cinquième resta coincé, la Madone s'anima et réprimanda Janeton :
« Tu as envoyé 5 cailloux contre moi, tu attendras 5 ans pour te marier ».
Aujourd'hui les amoureux du pays qui désirent connaître le nombre d'années qui les séparent du mariage tentent d'y loger des pierres. Chaque coup manqué représente une année d'attente avant le mariage.

Ma ballade commence gentiment, mais je préfère vous prévenir : les gens d'ici, les médiévaux, ne sont pas si 'convenables' que vous pourriez le pensez …

De l'autre côté de cette porte, nous sommes dans le château de Lasnours. Observez bien à présent cette paterne, elle semble condamnée, close d'une forte porte de bois, fermée à clé... ! 



Voilà mon histoire :
Non loin de là, sur un fief qui ne vaut pas plus de deux cents livres, vit un brave chevalier nommé messire Guillaume, riche en bonnes qualités, mais donc pauvre d’avoir. Obligé de subsister par sa valeur, qu'il a grande, courage, honneur, probité ; il coure les tournois ; mais contraint à l'humilité il ne s’amuse pas à faire aux dames de beaux saluts ou des signes de galanterie ; il s’élance, tête baissée, à l’endroit où la foule est la plus forte, et ne se retire que quand il a terrassé ou vaincu ses adversaires. Aussi, malgré tout devient-il connu et considéré.
Voisin, de Guillaume notre chevalier, demeure un très riche seigneur, veuf et père d’une fille belle comme le jour, nommée Ermengarde . Son château , qui n'est autre que celui de Lasnours à la belle poterne..., ainsi que celui du chevalier, situés dans les bois du pays limousin, ne sont distants l’un de l’autre que d’une grosse lieue.
Mais le château du vieux seigneur de Lasnours est bâti sur un monticule fort escarpé ; il se trouve en outre défendu par un fossé profond et par de fortes haies d’épines, de sorte qu’on ne peut y aborder que par le pont-levis. C’est là que s’est retiré le prud’homme ; il y vit tranquillement avec sa fille, faisant valoir sa terre qui lui rapporte annuellement mille bonnes livres de rente.
Avec une pareille fortune, vous jugez bien que la demoiselle, si bien gardée, mais si belle et aimable comme elle l’est, ne doit pas manquer de soupirants.
De ce nombre Guillaume a le projet de s'y associer et réfléchit aux soins de se faire remarquer et tenter de lui plaire...

Y arrivera t-il ?
A suivre ...

jeudi 14 juillet 2016

Qu'est ce 'qui' en moi, ne craint pas la mort ? -4/4-


Pour terminer cette réflexion sur la ''Résurrection de la chair'', je me rends compte de la complexité de cette proposition de foi…
Pour ma part, je retiens que l'Eglise n'a pas craint de s'attacher à la complexité... Qu'il est primordial d'affirmer ce que ce n'est pas ; mais illusoire de comprendre ce que cela peut être dans sa Réalité ultime...
La résurrection nous permet de comprendre '' ce que je suis'', dans mon essence et dans mon identité... La place primordiale qu'y tient mon corps.. Je suis un être ''intermittent, partagé entre deux vies séparées par la mort ''


« Dans l'anthropologie biblique, l'homme est une âme vivante. L'homme est créé âme vivante. L'homme est aussi appelé "chair", mais ces deux termes visant une seule et même chose : l'homme vivant, concret, l'homme dans sa structure biologique et psychique conjointement. » Claude Tresmontant - "La métaphysique du christianisme et la naissance de la philosophie chrétienne" (p. 577)

Tertullien s’étonne « du mépris de la chair des païens et hérétiques » ; c’est pourquoi« il est nécessaire que d’abord aussi nous défendions la chair. […] Si la chair est associée dans une même destinée à l’âme pour les choses de ce monde, pourquoi pas aussi pour l’éternité ?» (De resurrectione mortuorum, VII, 9-13)
Le matin de la résurrection ; BURNE-JONES, Edward ; 1886

Au XXIème siècle, l'ontologie humaine et chrétienne, questionne la philosophie. Il serait dommage que chrétien ou non, nous en restions aux vieux schémas : par exemple celui de l'humain constitué d'un corps et d'une âme...

Il est important aussi de comprendre qu'ici, n'est pas en jeu, mon seul salut, ma seule individualité... Il s'agit du salut de l'humanité...

St Irénée parle d'une création progressive... L'homme ( et l'humanité) a été créé inachevé...


samedi 9 juillet 2016

La Table Ronde










La clé de l’apaisement ou même d’une solution s’incarne souvent dans un meuble:
 '' la table ronde ''.
Son atout: tous ceux qui s’y assoient peuvent se parler à hauteur d’yeux.
Une table ronde a l’avantage de mettre tous les participants au même niveau. Les différences de pouvoir, d’influence, de légitimité, de nationalité, d’ethnie, de formation, de sexe, etc. sont momentanément effacées.

La table ronde, le meuble le plus démocratique de l’histoire de l’humanité !



















mercredi 6 juillet 2016

Qu'est ce 'qui' en moi, ne craint pas la mort ? -3/3-

De toutes les possibilités décrites, plus avant :


Pour R. Pouivet, l’ontologie qui à la fois permet de comprendre la possibilité de la résurrection et sa nécessité pour la survie d’une personne humaine est l’hylémorphisme...


R. Pouivet se pose cette cette question : « En quoi devrait consister mon identité si je dois ressusciter ? »

Si on parle de résurrection de la chair, la particularité de mon corps doit être retenue …
Et je deviens moi-même, un '' objets intermittents '', partagé entre deux vies, séparées par la mort...

L’hylémorphisme (de hulè : matière et morphè : forme) est une philosophie développée par Aristote qui considère que tout être (objet ou individu) est composé de manière indissociable d'une matière et d'une forme.

Un corps ( humain) ne suffit pas pour être une personne. On pourrait dire que le corps dépend ( ontologiquement) d'une âme pour être un corps humain...

Comment l’âme rend-elle possible la résurrection du corps ?

La doctrine de l’hylémorphisme consiste dans l’ensemble des thèses suivantes :
1. La distinction ontologique fondamentale passe entre les substances et les propriétés. Les substances possèdent des propriétés ou sont en relation avec d’autres substances ; elles ne sont dès lors pas des propriétés ou des relations.
2. Les substances matérielles sont des composés de forme et de matière.
3. Une forme est substantielle (et non accidentelle) si elle donne à une substance sa nature (ce qu’elle est) et son identité (ce qui fait qu’elle persiste à travers le temps en restant ce qu’elle est).

4. Une personne humaine est une substance composée d’une forme substantielle – on parlera de son âme – et de matière.
5. La forme substantielle d’une personne humaine est sa nature rationnelle.
6. L’exercice de la rationalité est essentiellement une opération immatérielle.
7. La nature humaine est essentiellement immatérielle ; pour exister, elle ne dépend pas de la matière.
8. Une personne humaine peut exister indépendamment de l’existence de son corps.
9. L’identité générique et l’identité numérique d’une personne humaine requièrent qu’elle soit unie à son corps.

Sources : (*) Roger Pouivet est Professeur de philosophie à l’Université Nancy 2 et Directeur du Laboratoire d’Histoire des Sciences et de Philosophie-Archives Poincaré (CNRS, UMR 7117). ''Métaphysique de la résurrection des corps.''






Jean-Pierre Ceytaire  Tendres instants avant la Pomme


Jean-Pierre Ceytaire  - Résurrection


Le symbole de Nicée comprend la formule : "J'attends la résurrection des morts, et la vie du monde à venir". Le symbole des Apôtres parle de "la résurrection de la chair".
Pour retrouver tout cela, c'est ICI :
Après avoir exposé les principales anthropologies rencontrées au sein du christianisme (matérialiste, dualiste, constitutionnaliste, fonctionnaliste, hylémorphisme, animaliste, quadridimensionaliste, irréaliste psychique et nihiliste) et leur rapport à la doctrine de la résurrection, Roger Pouivet tâche d’expliquer, dans le cadre des approches hylémorphiste (St Thomas d'Aquin) et animaliste, comment une personne, en tant que réalité singulière, peut ressusciter.
Métaphysique de la résurrection des corps. Avec Roger Pouivet à l'ENS Paris

dimanche 3 juillet 2016

Des Evangiles au Mythe de Salomé... -4/4-

Les contre coups politiques sont désastreux. La femme nabatéenne d'Antipas a eu vent de son renvoi imminent, et elle l'a prévenu en se réfugiant chez son père. Depuis, les juifs et les romains ont un ennemi acharné. La situation d'Antipas est précaire, car il doit désormais compter sur une guerre étrangère. En effet, son ex beau-père ne lui pardonnera jamais l'humiliation infligée à sa fille, ce dont la Loi juive ne faisait aucune nécessité. A l'intérieur, il doit faire face à une opposition puissante qui cache le déchaînement du fanatisme religieux.
Saint_Jean-Baptiste_et_les_pharisiens
- James_Tissot


Que vient faire un prophète comme Jean-baptiste dans cette affaire... ?
L'historien Josèphe rappelle le sort connu de tous d'Archelaüs, qui a connu le même genre de mésaventure et qui a été finalement déposé par l'Empereur... Jean le baptiste s'il provoquait un soulèvement aurait faciliter la coalition de l'opposition intérieure et des ennemis de l'extérieur... L'armée d'Arétas, aurait bien pu « préparer le chemin du Seigneur »( selon les propos de Jean ) ! Les romains craignaient l'idée du jugement du ''dieu'', qui de plus aurait démoraliser n'importe quelle armée juive … !
Antipas en exécutant Jean le Baptiste espère faire taire la critique ''intérieure''.


Cependant le mariage d'Antipas avec Hérodiade, causa le malheur du Tétrarque. Son ex beau-père éleva bientôt des prétentions sur la zone méridionale de la frontière. Antipas subit une défaite écrasante... dans le peuple, tout le monde déclara que cette défaite était une ''punition'' ( mariage, meurtre de Jean ..). Les romains durent intervenir pour garantir la frontière contre les nabatéens...
Les ennemis intérieurs d'Antipas eurent raison de lui, et il fut déposé par Rome, et exilé en Gaule, avec Hérodiade... Tout cela se produisit dix ans plus tard... ( Sources : Josèphe, Ant 18, 240-256 = XVIII, 7, 1.)


Hérodiade pourrait certainement n'être pour rien dans l'exécution de Jean le Baptiste. C'est Antipias qui en porte toute la responsabilité. Il a commandé l'exécution pour des raisons politiques, du fait de la situation d'urgence qu'avait provoquée le Baptiste lui-même.


Quelques autres questions de cohérence :

- "Après que Jean eût été livré " ( Marc 1, 4) Même mot que, pour Jésus, livré par Judas : Suggérait-il que Jean avait été dénoncé ou vendu par des disciples?
- Marc rapporte cette parole d'Hérode : "Celui que moi j'ai décapité, Jean". Le verbe n'est pas factitif (envoyer faire faire), et la présence du pronom "moi" met l'accent sur l'auteur de l'acte ( et non pas Salomé) .
- Marc présente Hérode Antipas comme un roi (basiléus), exerçant le pouvoir sur un royaume (Mc 6/22,23,25,26); ceci est inexact car l'Empereur lui avait concédé le titre de tétrarque...

- Lors du fameux banquet, Salomé n’était pas une jeune femme, mais une fillette de quelque onze ans. Elle n’a sans doute jamais dansé, encore moins lascivement, devant Hérode, Hérodiade et ses hôtes. Son sang royal et sa stricte éducation maccabéenne le lui interdisaient...
- Si Jean-Baptiste croupissait bien dans les cachots de la citadelle de Muwakir. Le banquet ne pourrait s'être donné que bien loin de là, quelque part en Galilée sur l’autre rive du Jourdain – dans le château où vivait Salomé. Peut-être dans la capitale du sous-royaume d’Hérode située sur la rive de l’actuel lac de Tibériade.
- Salomé ne s’appelait pas Salomé. Le prénom de la fille unique d’Hérodiade est inconnu, mais ne saurait être Salomé car l’une de ses tantes s’appelait ainsi. Selon la coutume maccabéenne, un enfant ne pouvait prendre le nom d’un proche parent encore vivant.
Bussiere, Gaston (b,1862)
- Salome- Dance of Seven Veils


Vania Zouravliov - Salomé

Le fait historique ne nous est pas tout à fait connu... Il nous reste un message, à travers une histoire qui n'en finit pas de nous fasciner, et parfois bien loin du message évangélique … A nous de discerner …