jeudi 30 juin 2016

Des Evangiles au Mythe de Salomé... -3/4-

Cet épisode biblique est intéressant, car il nous permet de comprendre sur pièce, le traitement narratif que les rédacteurs des Evangiles ( du moins Marc, et Matthieu), font d'un épisode historique ( reconnu des historiens ..). 


L'analyse historique : La mort de Jean le Baptiste :


Cette histoire – pour se répandre dans le peuple - reprend des clichés habituels : pour mettre en scène une intrigue de cours, on a besoin de femmes malignes, d'un prince bon enfant, d'une victime, d'une promesse faite par inadvertance, de sensualité ...etc.
Judaea - Herodianer, Herodes Antipas, Schekel Jahr 140

Josephe est sans doute plus près de la vérité quand il donne pour véritable motif de la mort de Jean, la crainte qu'avait Hérode d'un soulèvement...
** Rappel : HÉRODE ANTIPAS : Tétrarque de Galilée et de Pérée à l’époque de Jésus de Nazareth (4 av. J.-C. -39 apr. J.-C.), né en 21 av. J.-C. env., mort en 39 apr. J.-C. Fils d’Hérode Ier le Grand (73 av. J.-C. -4 av. J.−C.) et de sa quatrième femme, Malthace (Samaritaine)


Avant d'être avec Herodiade, Antipas était marié avec une princesse nabatéenne, la fille du roi Arétas IV. Diplomatiquement, cela avait été un coup de maître. Arétas est un voisin du sud, et ila avait une fâcheuse tendance à s'étendre vers le nord. Le mariage avait pour but de la mettre en échec : on ne fait pas la guerre à un gendre pour lui rafler du pays ! C'est pour cela que les romains avaient été d'accord avec la chose, bien qu'ils n'apprécient généralement pas les contacts entre leur clientèle de princes et les rois indépendants. C'est alors que c'est produit l'histoire d'Hérodoade ; source d'inconvénients politiques... !
Antipas et Herodiade, avaient sans doute la même ambition...
Hérode avaient souvent changé son testament. Il désignait chaque fois un nouveau légataire universel. Antipas avait été aussi l'un d'eux, mais lors du partage des biens il n'a réussi à s'imposer que comme tétraque. Hérodiade était mariée à l'un des précédents légataires universels, le frère d'Antipas. Lors du partage final, son époux, avait été encore plus mal loti. Il n'a rien eu !

Mais, Hérodiade, par sa mère Mariammee, descend de la maison des Asmonéens. Elle est une princesse authentique.

Les Hérodiens ne sont au contraire que des parvenus. Par contre, une princesse ne rêve de devenir que Reine ; et puisqu'elle ne peut pas le devenir par son premier mariage, elle le pourra peut-être en épousant un ' prince'... Ce n'est pas par hasard que les deux se sont amourachés l'un de l'autre, au moment précis où Antipas entreprenait son voyage à Rome ; avec l'espoir de succéder au préfet Valérius, en devenant ainsi roi de Judée et de Galilée...
Macheronte ou Machaerus ou Makawir
sur cette colline surplombant la Mer Morte
se dressait le château de Hérode Antipas


Le divorce de la femme, peut se rencontrer: comme Salomé, soeur d'Hérode 1er, qui divorce de Drusilla... Au Ve s. avant Jésus-Christ les juifs de la colonie égyptienne d'Eléphantine admettaient le divorce de la femme. Nous avons un témoignage semblable en Palestine au temps de la révolte de Bar Kocba ( 132-136 ap JC)

- Mais, ce mariage a bien été un fiasco politique pour Antipas.. !
Antipas a pris la femme de son frère. Cela va contre la loi juive. Ensuite, Hérodiade avait pris l'initiative, c'est elle qui a mené l'affaire en opposition avec les coutumes... Enfin, Hérodiade a voulu qu'Antipas renvoie sa première femme, alors que la loi juive l'autorisait à vivre avec plusieurs épouses en même temps. Ces atteintes à la Loi ont suscité le mécontentement chez les gens. Le Baptiste s'est fait le porte-parole de l'opposition politique intérieure.


Ce qu'il reste du palais d'Hérode Antipas...
D'un autre point de vue, Hérodiade n'a rien fait d'autre que réclamer les droits dont disposent toutes les femmes de l'empire romain. A Rome une femme peur demander le divorce, tandis que chez les juifs, seul l'homme peut renvoyer sa femme. A Rome, un homme n'a pas le droit d'avoir plusieurs épouses à la fois. Cela est un progrès, et montre que la femme a la même valeur que l'homme...
Jean le Baptiste ne serait-il qu'un prophète rétrograde.. ?

A moins que ne resurgissent dans le peuple, de très vieilles images : Elie, qui s'est opposée à l'influence païenne de Jézabel... La rumeur affirme ainsi qu'il aurait été Elie revenu sur terre.     A suivre ...

lundi 27 juin 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-9/.- La Foi -2

Le contraire de la Foi, n'est pas l'athéisme ou l’agnosticisme, c'est l’idolâtrie. ( Le second des 10 commandements …- Ex 20, 4-5). En langage zen, l’idolâtrie c'est ''prendre le doigt qui montre la lune pour la lune elle-même ''.


Jésus dit à la samaritaine : « Dieu est esprit, et ceux qui l'adorent, c'est en esprit et vérité qu'ils doivent l'adorer » ( Jn 4, 24)


La foi n'est pas à la recherche de la sécurité ; c'est accepter l'insécurité... La crucifixion, c'est l'image d'un dieu que l'on renonce à posséder...


Si « l'espérance ne déçoit point » ( St-Paul : Rm 5,5), c'est que l'espérance ne se rapporte pas à un futur éventuel, mais à la réalité du ''présent''... 

Cette espérance, procure une ''joie'' qui est sereine, indépendante de tous les aléas, et accidents de la vie … Cette espérance se réfère à une réalité qui existe, mais qui reste à découvrir...

Tout ceci paraît simple... mais, que cela est difficile à mettre en pratique ! ( Je parle pour moi...).
C'est l'espérance, dans l'absence d'espoir … Espérer en Dieu, oui. C'est à dire ne pas espérer quelque chose demain …












Maxime de l'écrivain anglais Chesterton:  "Un homme qui ne croit pas en Dieu est prêt à croire n'importe quoi."


Sources : Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles '' 

vendredi 24 juin 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-9/.- La Foi -1

La religion ne s'utilise pas, à l'image de ''l'opium du peuple'' par exemple. Ce n'est pas une assurance. On ne ''croit'' pas pour répondre à un vague sentiment de bénédiction ou de protection... En Mat 10, 34, Jésus prévient ; il n'est pas venu nous apporter la paix

Chercher la vérité, n'est pas un chemin suave ; il faut affronter la réalité telle qu'elle est... De plus, il est souvent nécessaire d'enlever le vieux pour bâtir du neuf ( cf : Mt 9, 16).
Il faut se débarrasser de la religion de la peur et de l'espoir.
« La religion, prise pour source de consolation est un obstacle à la vraie foi : en ce sens l'athéisme est une purification. Je dois être athée avec la partie de moi-même qui n’est pas faite pour Dieu. Parmi les hommes chez qui la partie surnaturelle d’eux-mêmes n’est pas éveillée, les athées ont raison et les croyants ont tort. » Simone Weil



La Foi n'a rien à voir avec les croyances, les dogmes, les 'credo' ou la théologie.
La foi est existentielle, et non intellectuelle... La foi, c'est une volonté, un ''courage d'être'' ( selon Tillich).

Le ''Notre Père'' est une belle présentation de la foi... «  Que ta volonté soit faite... » : lâcher prise de son ego, et accepter ''ce qui est ''.

La foi n'est pas de l'ordre de l'obéissance... Plutôt de l'amour érotique : se laisser faire … !
Il n'y a pas de conflit d'intérêt entre moi et Dieu : '' servir Dieu'' c'est me rendre heureux … Donner-Recevoir.
Pour exprimer ce ''lâcher-prise'', Jésus dit « Moi et le Père sommes un »




Avoir la ''Foi'', c'est l'équivalent d'avoir un esprit non encombré, un 'cœur pur' : « Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu. » ( Mt5, 8).
La foi n'est pas une armure, c'est le contraire ! Elle ne réclame pas de prosélytisme, elle n'endoctrine pas...


Aucun d'entre nous ne possède la Vérité... Il y a des vérités relatives, liées au savoir...

Pour ce qui est de la Vérité ( absolue)... Retrouvons l'esprit d'enfance : nous ne savons pas..!
Bien entendu ! Sinon, cette Vérité ne serait qu'un savoir...

Sources : Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles '' 
Images de Sarolta Ban

mardi 21 juin 2016

'' Le monde renversé ''

On inverse les rapports entre deux termes du monde réel (êtres humains, animaux, corps célestes...), afin de produire une représentation impossible...
Ce thème inspirera de nombreuses estampes populaires jusqu’au XIXe siècle.

Sont mises en scène :
des oppositions positionnelles entre l’homme et l’animal
des inversions cosmiques et sociologiques …


Le monde renversé  - estampe De la fabrique de Pellerin, imprimeur-libraire, à Epinal - 1829 -
Le monde à l’envers se lit en creux à partir des certitudes communes sur le monde à l’endroit, et si, vers 1850, Pellerin met en scène les rapports entre les sexes (« La femme monte la garde, et le mari fait la provision du ménage », « Les hommes font la cuisine, et les femmes boivent à leur santé ») et même les rapports sociaux (« La maîtresse apporte à déjeuner à la servante », « L’écolier met le bonnet d’ignorant à son maître et lui donne le fouet »), il ne s’agit pas d’un programme d’action subversif mais de représentations censées être aussi impossibles que « Le cochon conduisant un homme ».


samedi 18 juin 2016

Des Evangiles au Mythe de Salomé... -2/4-

Si l’historien Flavius Josèphe est le premier à donner le prénom de Salomé au personnage de la danseuse, les Pères de l’Église chrétienne vont exploiter les ellipses du récit fondateur biblique pour donner à cet épisode une portée didactique moralisatrice. À l’époque, la femme est considérée comme une menace, et une tentatrice. L’archétype de cet imaginaire féminin est Ève, coupable du péché originel.
tympan du portail saint Jean
de la cathédrale de Rouen, XIIIe siècle
Salomé apparaît encore comme le pendant négatif de Judith. Le livre d'Esther (Marc,6, cf. Esth, II, 9 ; Marc, 6, 23, cf. Esth., V, 3)

Jean Chrysostome et Augustin d’Hippone (IV-Ve siècle) sont à l’origine des caractéristiques du personnage de Salomé développées plus tard et reprises dans la littérature : la danseuse perverse, la femme fatale et l’incarnation du vice.

Un extrait de l'Homélie 24 sur l’Évangile de Matthieu de Saint Jean Chrysostome, montre que si les écrivains des XIXe et XXe siècles ont vu en Salomé le mythe de la femme fatale, leur vision est peut-être en rapport avec ces commentaires d’hommes d’Église. De plus, ce sermon illustre la misogynie qui fait de la femme un être dangereux, associé au démon et au mal, représentant la luxure et le vice.
Benozzo Gozzoli, La Danse de Salomé,
Washington, National Gallery, 1461


Sous la plume de Saint-Augustin, Salomé se livre en toute conscience à une véritable bacchanale et mérite logiquement un châtiment sans appel. Celui qu’Augustin invente se révèle d’un symbolisme flagrant : Salomé meurt décapitée par les glaces d’un fleuve gelé. Sa mère n’est pas épargnée par un destin tragique mais au combien moral : c’est en aveugle qu’elle termine ses jours, réminiscence sans doute de l’errance d’Œdipe après la révélation de ses propres crimes d’inceste et de parricide.



Salomé et le XIXe siècle.
Si le mythe de Salomé a connu un véritable succès au XIXe siècle c’est sans doute d’une part grâce au mouvement littéraire qui caractérisait cette époque : le symbolisme.
Salomé, Lucien Lévy-Dhurmer, 1896


L’évolution du mythe s’est aussi faite grâce au développement des droits de la femme au sein de la société du XIXe .
« Il faut voir dans le développement du féminisme au XIXe siècle l’un des facteurs de la réactivation de ce mythe. Du fait qu’elle revendique sa part des droits de l’homme et du citoyen, la femme est apparue d’autant plus dangereuse au regard de l’idéologie conservatrice que la séduction (danse de Salomé) a pour fin inéluctable la castration (décollation de Jean-Baptiste) » Daniel Grojnowski et Henri Scepi : Cité par Pascal Agrien, « Salomé, un mythe littéraire » [en ligne] http://dma1.over-blog.com/articlesalome-un-mythe-litteraire-97398714.htm

Les auteurs germaniques ont enrichi le mythe, au XIXe siècle, de l'amour de Salomé pour Jean-Baptiste et du scandaleux baiser à la tête coupée. Oscar Wilde inventera ensuite l'expression de la Danse des sept voiles.

mercredi 15 juin 2016

Une chambre en Chine, Lyndon Wade

Vous vous rappelez - La Chambre 107 - dans un Motel des Etats-Unis ...?
D'après le même '' Lyndon Wade ''; ce n'est pas mieux en Chine ...!















dimanche 12 juin 2016

Des Evangiles au Mythe de Salomé... -1/4-

Edward Armitage RA (1817 – 1896) was an English Victorian-era painter 

Ce fait divers, mais qui est aussi un épisode ''historique'', est repris dans deux évangiles. Son exposé est intéressant, et montre aussi la manière d'aborder la narration de faits, dans un projet comme les Evangiles... On peut comparer le traitement de cet épisode, avec ceux des mages, et peut-être – pourquoi pas ? - avec les miracles... ?

Bien sûr, ce récit n’occupe à première vue qu’une place anecdotique au sein du Nouveau Testament : les deux versions se présentent de fait pour expliciter les circonstances de l’emprisonnement et de la mise à mort du prophète Jean le Baptiste.






Reprenons l'histoire : Jean-Baptiste dénonce la liaison incestueuse entre Hérode-Antipas et Hérodiade, la femme de son frère, Hérode Philippe. Hérode, qui craint Jean le Baptiste, n'ose le condamné à mort. Il se contente de l'emprisonner, ce qui ne satisfait pas Hérodiade. Celle-ci demande à sa fille, Salomé, de danser pour Hérode. Ebloui par la jeune fille, Hérode lui fait le serment de lui donner ce qu'elle veut. Sur l'injonction de sa mère, elle demande la tête de Jean-Baptiste, qu'Hérode est contraint de lui accorder. (Marc, 6, 14-29 ; Matth., 14, 1-12)

Le Mythe : Salomé :

Filippo Lippi
Dans les Evangiles, la figure de la jeune danseuse n’est pas nommée. Elle apparaît seulement comme soumise, secondaire et fugitive. Toutefois, l’imaginaire littéraire et artistique va en faire un véritable mythe. La figure de Salomé, va devenir le portrait de la femme séductrice suscitant tous les désirs, et le symbole à la fois de la femme fatale et de la cruauté féminine.

Le mythe de Salomé traverse les siècles, son personnage fait l’objet de différentes interprétations et réinterprétations. Elle passe de la petite fille obéissante et instrumentalisée par sa mère à la femme fatale, brûlée d’amour pour l'ascète Jean (et qui d’ailleurs demande d’elle-même sa tête pour se venger de son refus). C’est en effet, vers la moitié du XIXe siècle, siècle de l’éclosion du mythe de Salomé, que celle-ci commence peu à peu à s’approprier une personnalité à part entière : elle est nommée par son nom et n’est plus confondue avec Hérodiade sa mère.
Salomé - 1953


Le mythe est à prendre au sérieux, autant, sinon plus, que le fait historique, l'un enseigne sur l'autre et il ne faut pas les confondre.... «  Le mythe est à l'origine de la pensée, et même de la pensée historique. L'histoire est limitée et se construit sur une suite d’événements qui n'arrivent qu'une seule et unique fois, elle est bornée par le temps. Le mythe est perpétuel, il se renouvelle sans cesse et ne vieillit jamais. Il est donc toujours d'actualité. » J. P. Savignac, spécialiste de la civilisation gauloise...

Le mythe de Salomé va se construire au cours des siècles.
- Aux débuts du christianisme, c'est l'énoncé d'un discours édifiant, avec la danse comme acte dépravé et lubrique...
- Au Moyen Age, Salomé se lie avec Satan, la morale condamne la luxure, la sorcellerie ( le sabbat des sorcières)
- A la fin du XIXème, on quitte le champ du religieux, Salomé est une figure des arts...

- Le XXème siècle exploite le mythe dans le monde de la danse et du cinéma

jeudi 9 juin 2016

Des paraboles … Des histoires à conter, et raconter.

Quand j'ai vu cette série de gravures représentants des dessins de Millais, sur des paraboles... J'ai compris que ces histoires nous avaient été données, comme toutes les contes : pour être racontées à nouveau, à la façon de chacun … Parce que les histoires, les contes n'appartiennent à personne, elles sont libres comme l'air, et se répandent à qui veut les entendre, et les reprendre …
Si la Bible n'est pas un ''Conte''; une parabole, si !



La brebis égarée, perdue sur sa pente abrupte, est sauvée par le berger, de la nuit de l'ignorance, et des oiseaux de proies ….



Ici, le récit est allé jusqu'après la bataille. Le lion, remplace le loup, et savoure sa victoire... Le berger et l'agneau sont morts. Ils se confondent en Jésus : agneau qui sera sacrifié...

*****
Amusez-vous à les retrouver ...



















Sir John Everett Millais 
 The Parables of Our Lord and Saviour Jesus Christ - 1864