dimanche 12 avril 2015

Marie, et le frères de Jésus

Dans l’hebdomadaire - ''La Vie'' du 26 mars – Régis Burnet, théologien et historien du christianisme, échange avec Françoise Chandernagor, qui publie un roman intitulé ''Vie de Jude, frère de Jésus''... Et, à propos de Marie ; je relève ses interventions ( ici, en italique):
Marie, Jésus et ses frères
« En tant qu’exégète, je ne peux que constater que les textes canoniques (Actes et Épîtres de Paul) affirment que Jacques est le frère du Seigneur. Et le mot frère – adelphos, en grec – n’a jamais signifié autre chose que frère. Il existe un autre argument de poids : la première communauté de Jérusalem fut dirigée par Jacques, puis ensuite par Jude, des gens qui sont de la famille de Jésus. On est face à une succession dynastique, et donc familiale » Régis Burnet, théologien.
« Au IVe siècle, à partir du pape Damase, la question est soulevée. Car un courant ascétique monte alors en puissance, qui conduira plus tard au célibat des prêtres. Le secrétaire du pape Damase, saint Jérôme, se retrouve donc en mission commandée pour trouver des arguments en faveur du célibat sacerdotal. Les attestations dans les Textes laissant supposer qu’une famille nombreuse existait autour de Jésus, Jérôme va s’atteler à une première interprétation de textes apocryphes qui offrent la thèse des demi-frères. Et c’est encore lui qui lancera l’idée qu’en Orient, on appelle frère un peu tout le monde : les Évangiles mentionneraient ainsi des cousins de Jésus, au sens large. Avec ces arguments, Jérôme rédige Contre Helvidius, le traité où il défend la virginité de Marie et sur lequel l’Église s’appuiera pour déclarer la virginité perpétuelle au concile de Latran, en 649. Mais Jérôme s’est trahi lui-même, car il existe une lettre qu’il a écrite après le Contre Helvidius, où il laisse échapper que Jacques est le frère de Jésus. »

La confusion entre frère et cousin (en grec adelphos veut dire le frère, et anepsios, le cousin) passe par l’idée que les Évangiles seraient des traductions de l’araméen, ce qui n’est pas vrai…
« C’est faux, effectivement. Ils ont été écrits directement en grec. » R Burnet

«  On distingue la virginité avant la conception, pendant et après. Mais si vous reprenez la formulation de foi, elle concerne la virginité avant la conception : c’est ce qui est dit dans le Credo. »

Penser que Marie n’est pas restée vierge après la naissance de Jésus ne remet donc pas en cause le Credo ?
« Le Credo, non. Mais la tradition théologique de l’Église, oui. Il faut bien comprendre que les affirmations dogmatiques sur Marie concernent en fait Jésus. La virginité avant l’engendrement, c’est une déclaration christologique, la nécessité d’affirmer que Jésus est le fils de Dieu. Par la suite, en lien avec la foi populaire, la « mariologie » a développé d’autres interprétations. Mais ce que je dois dire, c’est qu’on ne connaît Marie que par quelques allusions des textes canoniques. La tradition autour de Marie a été construite à partir de traces très limitées. On en a fait une héroïne assez peu maternelle, tournée vers le destin de son fils, une femme qui comprend tout et admet tout dès le début. Alors qu’elle a dû connaître aussi des moments d’angoisse. » R B.
Pierre, Jésus et son frère Jacques.
« Historiquement, on est certain que la communauté des débuts a prêché d’abord et avant tout le Christ ressuscité : c’est là-dessus qu’elle se fonde. .. on est passé progressivement d’une conception divine liée à la résurrection à une conception divine liée à la conception. » R.B.

Le rôle de La Tradition, n'est pas d'augmenter le corpus ( limité ) de l'Ecriture... Elle est d'éclairer la compréhension des Textes. Il n'est pas étonnant que l'éclairage qui correspondait, il y a dix ou quinze siècles, nous paraisse peu adapté à nos savoirs de ce XXI ème siècle... La pression populaire en faveur de la figure de Marie ( apogée au XIXe s.) , ne s'exerce plus avec les mêmes modalités... Revenons à la ''Résurrection'' et reconnaissons que l'argument gynécologique de Marie ''toujours vierge'', pour affirmer la divinité de Jésus, ne nous impressionne plus ...

D'ailleurs Benoît XVI, avait écrit dans son ouvrage ''La foi chrétienne hier et aujourd'hui'' Cerf 2005 (imprimatur donné en 1969 pour la version allemande), page 192 : « ...La doctrine de la divinité de Jésus ne serait pas mise en cause si Jésus était issu d'un mariage normal. Car la filiation divine dont parle la foi n'est pas un fait biologique, mais ontologique ... »  

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