jeudi 9 mai 2013

Le conte du Graal, mythe et christianisation -2-


Le conte du Graal, comme roman mythique ?
Roman initiatique : Le conte est l'itinéraire de Perceval : il accumule les bourdes par son ignorance, oublie Dieu pendant cinq ans et fait montre d’un manque de courtoisie à toute épreuve, avant de renoncer à la gloire mondaine pour embrasser la cause du Graal. Il gagne l’autonomie de la pensée et du langage, et, en se libérant des schémas figés et étroits que lui avait inculqués sa mère, franchit le passage de l’adolescence à l’âge adulte.
On peut aller plus loin : en reconnaissant toujours la même scène qui se répète : de la rencontre initiale avec les chevaliers jusqu’à la scène du graal, en passant par la rencontre de Blanchefleur et les gouttes de sang sur la neige... C'est à dire la rencontre avec l'autre, que ce soit par un visage humain, ou une forme abstraite... Cette rencontre avec l’Autre, qu’il soit humain, merveilleux ou divin, révèle à Perceval l’être, le mystère …

Dès lors, si le roman de Chrétien de Troyes est une réflexion sur l’impossible rencontre avec l’Autre, si Perceval n’est plus un chevalier particulier mais un individu qui vaut pour tout le genre humain, s’il touche à une activité humaine fondamentale et significative investie d’une valeur d’exemplarité, alors il a bien un caractère mythique
Le souvenir trop lointain du mythe primitif donne naissance à un mythe nouveau, car cette idéologie est peut-être chrétienne, mais elle est, plus sûrement, le support de quelque mystère dont on a perdu la trace et la signification aujourd’hui. Mais peu importe, finalement, que cette signification ait été oubliée, puisque c’est justement dans cet oubli du sens que se construit aujourd’hui la dimension mythique du Conte du graal.


La christianisation contre le mythe ?
La question est de savoir si les romans du graal gardent un aspect mythique lorsqu’ils deviennent chrétiens ?
Si ce qui donne au roman de Chrétien de Troyes son caractère mythique, c’est sa capacité à laisser la signifiance du graal ouverte, vide ou en devenir, en gardant possible l’interprétation par le non-sens ou par une forme de présence absolue du rien – néant ou chose absolue, altérité irréductible. Alors, c'est précisément dans cette béance que vont s’engouffrer les successeurs de Chrétien de Troyes, et la christianisation, en réduisant le sens du graal en un sens unique... récit qui devient une sorte d'hagiographie d'une relique qui remonte à Joseph d’Arimatie ...


Le poème épique allemand : Parsifal, est composé de 1205 à 1215 par Wolfram d'Esehenbach
 Plutôt que de ramener à un temps mythique où hommes, fées, géants et autres créatures féériques cohabitaient, peut-on sans perdre le mythe, renvoyer à l'an zéro : naissance du Christ et début d'une histoire... ? Ou, s'agit-il de la naissance d'un nouveau mythe : celui de la chevalerie : le mythe se serait déplacé du graal à la chevalerie, de l'initiation d'un jeune homme à quelque mystère, à la justification chrétienne de la chevalerie … ?

Pour certains : Mythe et christianisation semblent présenter une incompatibilité fondamentale ; ils sont « adversaires » [Brunel 1988, p.10] : le premier est implicite, appuyé sur un en-deçà du récit et de la raison, la seconde est portée par un discours construit, rationnel et conscient.

Sources : Catherine Nicolas maître de conf. Montpellier

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