jeudi 26 novembre 2015

Les attentats, Dieu, la foi et l'Islam...

Ces événements tragiques, sont pour moi l'occasion d'entendre des responsables religieux, ou des hommes de foi, s'exprimer hors leurs posture ordinaire...
Daniel Péron - Les cavaliers de l'Apocalypse
Je salue, la sincérité de l’archevêque de Canterbury, chef spirituel des Anglicans, Justin Welby qui était l’invité d’une émission de la BBC, où on lui a demandé si les attentats de Paris lui avaient fait douter de la présence de Dieu… : Extrait.  « Oh oui alors. Le samedi matin, j’ai marché, prié et demandé à Dieu, pourquoi - pourquoi est-ce arrivé ? Où étais-tu dans tout cela ? Oui je doute. »
Ce témoignage est pour moi le cœur de la foi d'un homme de Foi. Que d'images de Dieu, avons nous à détruire ou du moins à interroger, en nous … !

Et puis, il y a les paroles de cet homme qui n'arrêtent pas de m'interroger. Il s'agit du musulman Ghaleb Bencheikh...
 Quelle chance avons-nous d'avoir cet homme qui nous interroge ainsi … !
Il excelle à démonter les discours des « imams autoproclamés », des « prédicateurs de pacotille ». Il n’y a, pour lui, « d’engagement dans une foi » que « tamisé par le filtre de la raison ».

D'abord sa réaction à chaud sur les attentats : Extraits :
« Ces attaques vont à l'encontre de toute éthique universelle et heurtent la conscience humaine. ( …) Ce qui anime ces terroristes :, c'est une idéologie mortifère ayant avili la religion islamique et perverti la révélation coranique. ( …) La responsabilité des hiérarques religieux musulmans qui, par pusillanimité ou par lâcheté, ont laissé depuis des années, les sermonnaires doctrinaires tenir leur discours fielleux et manipulateurs est plus qu'engagée. Ces derniers sont comptables et coupables des crimes perpétrés au nom de Dieu. ( …) A titre personnel, je me suis égosillé à le faire savoir depuis longtemps.  Alors, maintenant plus que jamais, une refondation de la pensée théologique combinée à une saine éducation fondée sur l'amour et la bonté, s'impose... »

Mais aussi, pour aller plus loin …
Extraits :
«  Il nous faut inventer une audace et une hardiesse intellectuelle, ne pas baisser les bras. Nous n’avons plus de réels débats d’idées, ici ou ailleurs.
G B. regrette que :Pour certains 'philosophes', le fait que les pays arabes et musulmans n’aient pas connu la période allant de Descartes au Siècle des Lumières, les réduit à une pensée sans importance. 
Daniel Peron - Musulmane
Sur la Laïcité : Les religions qui ont un clergé n’échappent pas aux tentations du pouvoir.... Le laïc ( le « laos ») est séparé du « clerc » qui exerce le pouvoir religieux.... La laïcité est un faux problème puisque le musulman ne se soumet à aucune église. La question de la séparation ne s’introduit que là où il y a des structures hiérarchiques verticales. » (…) «  s’il devait y avoir une tradition religieuse qui s’adapterait le mieux à un espace laïc, ou à un idéal laïc, ce serait bien l’islam. »
«  la laïcité pourrait se résumer à : c’est la loi qui garantit le libre exercice de la foi aussi longtemps que la foi ne prétend pas dicter la loi. En définitive, la laïcité, c’est le parapluie sous lequel nous nous abritons tous. Elle permet de réguler le croire ou le non-croire. C’est un principe, et non une philosophie de l’État comme certains veulent bien la présenter. »

Bien sûr, pour Ghaleb Bencheikh, il faut déconnecter la religion de la politique. (..) « quand il y a manipulation, domestication, idéologisation, instrumentalisation de la religion pour d'autres fins que spirituelles il y a danger de dérives despotiques et obscurantistes. Tout revient à la séparation des deux ordres. Il faut déconnecter la religion de la politique. »

« Je distingue trois moments dans la religion, mot lui aussi trop vide de sens à force d’être sans cesse utilisé.
Le premier je l’appelle « Religion force ». Chaque religion a des mythes. Ceux-ci interrogent le sens de la vie, du monde …
Il y a ensuite la « religion –forme », elle-même partagée en trois moments :
le moment « refuge », un lieu d'expression des détresses, un refuge pour les opprimés ..
le moment « repaire », où on retrouve tous les fanatiques,
le moment « tremplin » où la religion est un outil au service de la carrière personnelle.
Le dernier moment, le « moment-cadre » est le moment proprement lié à l’expérience du sacré ( cadre de l'expérience humaine du divin et du sacré )
( …)
Daniel PERON - Imminence 2
En matière de sens, la religion demeure une référence. Elle répond aux sempiternelles questions qui taraudent l'homme : la question des origines de la vie et des fins dernières. Quand la religion s'institutionnalise, elle devient un refuge, un repaire et un tremplin. Elle est un refuge pour les opprimés sur la terre, elle est un repaire pour fanatiques extrémistes et elle est un tremplin pour les carriéristes, ceux qui n'ont pas su faire autre chose qu'exploiter la religion pour leurs ambitions personnelles. »
[Verset 19] Peut-on comparer à un aveugle celui qui est convaincu que ce que ton Seigneur t’a révélé représente bien la vérité? Mais seuls en saisissent le sens ceux qui sont doués d’intelligence » Sourate du Tonnerre. 
Pourquoi dire cela ? Peut-être parce que la réflexion est une affaire intime et nullement incompatible avec la foi. J’appelle à un sursaut des consciences et ceci signifie d’abord une honnêteté vis-à-vis de soi-même. Il faut réveiller nos automatismes paresseux. Il faut sans cesse remettre nos certitudes en doute. Subvertir sa propre pensée c’est commencer en philosophie.
« 
Que sont donc encore ces églises si ce ne sont pas les caveaux et les tombeaux de Dieu ? » écrivait Nietzsche.

Daniel Peron
Sur le voile : « Le véritable voile de nos soeurs et de nos filles musulmanes consiste en leur instruction et leur acquisition du savoir. Je suis atterré de la régression tragique à laquelle nous assistons suite à ce « revoilement » de certaines femmes musulmanes. Rappelons nous que le scoutisme islamique dont le guide spirituel était Abdelhamid Ben Badis était composé de garçons en bermudas et des filles en jupe. »

Et enfin : très important, pour répondre aux incongruités du Front National du genre de cette parole de Marion Maréchal-Le Pen, qui estime dans un entretien au quotidien de l'extrême droite catholique Présent, paru ce samedi 21 novembre, que les musulmans "ne peuvent avoir exactement le même rang que la religion catholique" en France.

« Tant que l'on traitera l'élément islamique en termes d'extériorité et d'étrangeté nous nous vautrerons toujours dans les basses eaux du débat. L'Islam n'est ni allogène, ni incongru ni intrus au contexte européen. Nous appartenons à une aire euro-méditerrannéenne sur une longue ère civilisationnelle ensemencée sur le plan spirituel par le monothéisme abrahamique judéo-islamo-chrétien d'expression gréco-arabe. »


Ghaleb Bencheikh, né en 1960 à Djeddah en Arabie saoudite, est un docteur en sciences et physicien franco-algérien. Il est soufi. Il est également de formation philosophique et théologique et anime l'émission Islam dans le cadre des émissions religieuses diffusées sur France 2 le dimanche matin. Il préside la Conférence mondiale des religions pour la paix...

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