samedi 4 février 2017

Histoire de sorcière: la 'Loba' de Laron. -1/2-

A ''notre époque'' ( celle de Roger de Laron, début XIVe s.), les sorcières ne sont pas encore pourchassées, puis tuées... Mais, déjà de nombreuses histoires mettent en scène les maléfices dont elles peuvent être capable ; en particulier quand certains hommes se sont mis en tête de s’acharner contre elles. 
Ici, dans notre vallée de la Maulde, les quelques maisons, bicoques, se blottissent entre elles, l’église, un peu à l'écart, car seuls les morts ont le privilège de la côtoyer pour toujours … Autour de cette clairière habitée, le village est entourée de collines boisées et de forets... Sur une hauteur, le château n'est pas véritablement un signe rassurant...
Chacun, ici, sait que la forêt est un lieu dangereux, à la peur du loup s'ajoute celle des brigands et l'inquiétude suscitée par les travailleurs de la forêt, bûcherons ou charbonniers, considérés comme des marginaux. Et précisément, deux d'entre eux, qui par nécessité, chassent les loups ont le projet de s'en prendre à une vielle femme isolée: '' La Loba ''...
Ils sont persuadés que cette cette femme, en plus de ses dons de jeteuse de sorts, ''gouverneraient'' les loups : elle serait une ''meneuse de loups''... C'est logique, le loup est associé au mal, et parfois certains hommes ou femmes se font ''leberous'', pour se rendre au sabbat ( j'en reparlerai ...)

De ces deux bûcherons et chasseurs, le premier s'appelle ' Gros-Jean'. Ce jour d'hiver, il dit vouloir profiter du beau temps, et part chasser...
On n'a plus revu Gros-Jean, vivant... Dès la fin de cette journée, le temps s'est gâté, le mauvais temps s'est installé ; et on a entendu les loups...

Le soir de ce même jour, le deuxième homme qui voue donc aux sorcières une haine tenace, se trouve seul dans sa cabane des bois, habitation de bois assez confortable tout de même, pour posséder une cheminée. Il est assis là devant le grand feu avec à ses côtés ses deux chiens, tandis que la pluie crépite contre la fenêtre et que le vent se lamente...
Soudain, la porte s'ouvre. Le chasseur voit sur le seuil un chat plutôt mal en point, la fourrure trempée, tout maigre et tout tremblant.
Les chiens se dressent sur leurs pattes en grondant. Ils n'en feraient qu'une bouchée si leur maître ne les retenaient pas … On surnomme l'homme : ''le chasseur des collines'' de par son activité où il excelle …
Plus tard, il expliquera qu'il avait arrêté ces chiens parce que le chat s'était mis à parler, et lui demandait une faveur qu'il ne pouvait refuser....
- C'est ainsi que l'on raconte cette histoire par ici à la veillée...

La bête – à la belle voix de jeune femme – explique qu'elle est une jeune sorcière qui décide de renoncer à ses maléfices, et qu'elle demande protection contre la fureur vengeresse de ses pareilles...
L'homme fait entrer le chat, qui s'assoit devant l’âtre tandis qu'il réfléchit. Mais, l'animal semble tout à fait innocent. Il se lèche soigneusement, et son poil retrouve son lustre. Puis il s'installe commodément, étirant ses griffes et enroulant sa queue autour de son corps, et se met à ronronner d'aise. Les chiens s'agitent nerveusement, mais le laissent tranquille …

Engourdi par la chaleur et bercé par le ronronnement du chat, le chasseur finit par s'assoupir. Dehors la pluie continue de faire rage. A un moment donné l'homme ouvre les yeux, les chiens se dressent en grondant et leur poil se hérisse.
Le chat a disparu. A la place se tient souriant d'un air placide, une habitante du village connue de tous, qu'on appelle la ' loba' ; celle là même que nos deux hommes désignent comme une meneuse de loups !
« Tu es un homme facile à duper, chasseur, dit-elle. Ton ami 'Gros-Jean', l'ennemi des sorcières, est mort aujourd'hui. Il gît par cinq coudées de terre, m'ont dit mes sœurs, et les vers le dévorent... A présent, c'est ton tour. »

Elle lui saute à la gorge, toutes griffes dehors et les yeux luisant de rage. Mais les chiens sont plus rapides. Ils la terrassent.
Et pendant quelques minutes une terrible mêlée oppose les bêtes grondantes et la femme saignant sous les morsures, tandis qu'elle leur déchire le ventre de ses ongles aigus. Puis c'est le silence, entrecoupé seulement par les gémissements des bêtes blessées et les battements d'ailes d'une corneille au-dehors. La ''chatte'' s'est évanouie, et les chiens halètent, couchés sur le flanc.

Le chasseur vient raconter la scène au village le lendemain, le visage hagard, en portant les corps de ses chiens. Il apprend que '' la loba'' est clouée au lit, et que les gens du village craignent pour sa vie.
Sans mot dire, il sort et se dirige d'un pas rapide vers la maison un peu à l'écart où vit la femme...

A suivre …


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