« Du côté de chez Swann », premier volume de
La
Recherche de Marcel Proust parait en 1913. Cette même
année, le 13 novembre 1913, naît, dans un petit village d’Algérie,
celui qui deviendra l’un des écrivains les plus importants du
XXe siècle, Albert Camus, et qui obtiendra, en 1957, le prix
Nobel de littérature.
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1913 - Deauville |
Cette année 1913, veille d’une catastrophe mondiale, est un
bon millésime en matière littéraire et artistique : c’est
la publication d’
Alcools par Apollinaire, du
Grand
Meaulnes par Alain-Fournier, de
La Colline inspirée par
Maurice Barrès, de
Les Copains de Jules Romains...
Élève de terminale S, je lisais Camus avec vénération et
application : ses textes interpellaient profondément le jeune
catholique que j'étais ; ils éveillaient en moi un
agnosticisme que je n'osais m'avouer … Alors que je l'avais cité
dans une dissertation de philosophie, mon professeur m'indiqua dans
la marge que Camus ne faisait pas de la philosophie, mais de la
littérature. Son avis n'étant pas justifié par la raison ( ou le
raisonnement) je ne pouvais m'appuyer sur lui, pour argumenter …
J'étais un peu blessé …
C'est en cela, sans doute, que mes questions existentielles
dépassent le cadre étroit de la philosophie …
Aujourd'hui, chacun reconnaît sa grandeur : en particulier
de n'être pas tombé, comme Sartre, un vrai philosophe lui, dans
l'idéologie au profit de la morale... Il refuse de prendre parti
pour le FLN, il dénonce le terrorisme : «
En ce
moment, on lance des bombes dans les tramways d'Alger. Ma mère peut
se trouver dans l'un d'eux. Si c'est cela la justice, je préfère ma
mère. »
Albert Camus, est un maître spirituel, à part égales avec
Georges Bernanos, et Simone Weil... il est un penseur agnostique qui
parlait aux chrétiens.
«
J'ai beaucoup à dire sur le catholicisme, mais il me
semble que je ne suis pas d'accord avec vous sur la façon dont il
faut le critiquer. Si sa philosophie n'est pas la mienne, si je me
sens coupable d'argumenter contre elle, le lui prête nullement des
intentions méprisables. » ( à Francis Ponge, en 1934)
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Christ humilié |
Camus décrit sa présence entière et lucide au monde, cette
attention à l'ici et maintenant, cette conscience « du poids
de sa propre vie », tourné vers l'amour charnel de la nature
et des corps, il ne peut souscrire au dogme chrétien de « la
vie éternelle ». «
Si je refuse obstinément tous
les « plus tard » du monde, c'est qu'il s'agit aussi bien
de ne pas renoncer à ma richesse présente. Il ne me plaît pas de
croire que la mort ouvre sur une autre vie. Elle est pour moi une
porte fermée » ( Noces ).
«
Ne me sentant en possession d'aucune vérité absolue
et d'aucun message, je ne partirai jamais du principe que la vérité
chrétienne est illusoire, mais seulement de ce fait que je n'ai pu y
entrer. ».
Il regardait la figure du Christ en se disant : “
Ce Dieu fait
homme parle à l’homme.” Il n’était pas un chrétien sans
le savoir, mais son agnosticisme n’empêchait pas une ouverture
considérable aux chrétiens, à la culture biblique et à la figure
du Christ. «
Je n’ai que vénération et respect devant la
personne du Christ, et devant son histoire. Je ne crois pas
à sa Résurrection. »