mardi 26 novembre 2013

Le nom de Dieu: Ehyeh Asher ehyeh -2-


Citation de Annick de Souzenelle ( La parole au cœur du corps )
«  Remarquez tout d'abord que Moshé, le nom hébreu de Moïse, est constitué exactement des mêmes lettres - mem, shin, hé – que le mot Hashem qui signifie... le Nom ! L'ordre de ces trois lettres est simplement inversé, ce qui est évidemment une invitation à nous « retourner » intérieurement, à nous convertir, à revenir à notre origine : au Nom que nous sommes en profondeur.
Lorsque Dieu se révèle à Moïse par une voix qui sort du buisson ardent, Il se manifeste en tant que Dieu d'Israël qui n'est pas encore « accompli ». C'est pourquoi le verbe être intervient ici dans une forme hébraïque dite « inaccomplie » : non pas comme YHWH, mais comme « Eyieh Asher Eyieh », que l'on peur traduire par «  Je serai qui je serai »
Un Dieu « inaccompli ».. ?

Simple façon d'exprimer que Dieu, en tant qu'il s'incarne est en devenir … (...) C'est alors que le Dieu d'Israël se révèle non comme « Je suis », mais comme «  Je suis en attente d'accomplissement ». Cette nuance essentielle est admirablement rendue par la structure du temps de l'hébreu, qui ne connaît pas notre linéaire passé-présent-futur, mais qui dit le monde en termes d'accompli et d'inaccompli »



Citation de Jean-Yves Leloup : ( Qui est « Je suis » ? )
« Le nom pour un sémite, c'est l'essence d'un être. C'est sa présence même. ( …) Dans Ehyèh, nous retrouvons la racine du verbe 'être' (hyh). Ce verbe, en hébreu, signifie «  une existence, une présence active », d'où la traduction la plus courante : «  Je suis ». La Bible grecque des Septantes va traduire Ehyèh asher Ehyèh par : Ego Eimi ho ön, et la Vulgate, Ego Sum qui Sum, d'où les traductions françaises qui s'en inspirent : «  Je Suis Celui qui Est », « Je Suis Celui qui Suis », « Je Suis qui Je Suis ».
Le livre de l'Apocalypse propose une version développée de ce même nom : «  Ho ôn kai ho ên kai o erkhomenos » - Celui qui Est et qui Etait et qui Vient, rappelant ainsi que le «  Je Suis » divin embrasse tous les temps. (…)
Thomas Merton va jusqu'à traduire : « Je suis Celui qui n'existe pas » pour rappeler que Dieu n'est pas un « existant » comme les autres, sinon il serait mortel comme tout c qui existe. «  Je n'existe pas, JE SUIS ».



Citation de Philippe Mac Leod : Le buisson ardent
Habituellement, nous projetons en Dieu les contours les plus sommaires de notre psychologie, alors qu'il se donne comme l'horizon de notre personne humaine. Je veux dire par là que nous ne nous comprenons bien qu'à la lumière de sa transcendance, en découvrant les liens qu'elle entretient avec ce que nous sommes au plus profond, en concevant enfin la personne comme une intimité et non plus comme une individualité.
Pour mieux l'entendre, je t'engage à fermer les yeux un moment, comme on prend du recul, et à descendre avec ton esprit à l'intérieur de ton cœur pour tenter d'approcher ce qui nous définit ou nous distingue comme personne : non pas une volonté, une raison, qui restent l'individu, encore moins les pensées qui tournoient sous la voûte de ton crâne et qu'il te faut écarter comme les feuilles coupantes d'une forêt vierge ; non plus seulement cette conscience vague dans laquelle nous baignons, mais plus loin, plus au fond, plus clair et plus aigu, quand le sentiment de soi s'affine dans le silence du recueillement, ce vibrato, ce chant de source, à la fois changeant et immuable, immobile et fuyant, cette note longuement tenue, ce murmure universel qui nous traverse de part en part, ce sentiment d'une rare pureté de l'être que nous sommes, ici et maintenant, et qui ne peut surgir qu'en parvenant à notre extrême singularité – oui, cette intériorité de plus en plus ouverte à mesure qu'elle se creuse et qui sonne comme l'alpha et l'oméga de toute chose.
C'est bien là, au plus secret, au plus désert de moi-même que j'entends retentir le nom de Dieu, comme Moïse dans le buisson qui brille sans jamais se consumer et lui murmure ce «Je Suis» que nous pouvons expérimenter en chacun de nous, dans un silence d'une acuité qui illumine notre conscience la plus intime, d'une densité qui fait d'elle un feu palpitant, une flamme qui brûle et s'élève éternellement à l'intérieur de chaque être. Aucune image de soi ne résiste à cette révélation d'une présence nue, éclatante, qui fait que les choses sont, en les habitant, en les enveloppant, une présence qui dans le même temps ouvre l'espace du monde où nous pouvons à notre tour la rejoindre. « Je suis celui qui suis. » « Je suis "Je suis". »
Il nous faut ramasser toute notre existence pour entendre ce nom, pour l'entendre résonner et réveiller l'être que nous sommes. Et c'est là que nous-mêmes devenons une personne, à son image et ressemblance, autrement dit une présence, une intimité, comme s'il était donné à chacun de porter l'intérieur du monde - et en vérité il n'est pas d'autre sens à l'intériorité humaine, en vérité il n’est pas d'autre trésor que cet immense et fragile sentiment de soi.

Comprends-tu maintenant ? Ce que nous appelons « l'amour de Dieu pour les hommes », qui se manifeste en plénitude dans l'incarnation, n'est autre que le murmure de son nom qu'il nous souffle éternellement, le feu de sa présence éternelle qui ne cesse de monter du foyer de notre conscience, pour peu qu'elle sache suspendre un moment son activité, se déchausser et s'agenouiller. Il ne nous aime pas extérieurement, occasionnellement, comme nous-même le faisons, mais intérieurement - d'un mot savant, je dirai : ontologiquement -, c'est-à-dire par son être et par l'être que nous sommes, en nous communiquant, nous transfusant sans cesse sa vie, en l'engendrant, en la multipliant, et c'est bien ce flux, son passage à travers nous, la joie, la plénitude qu'il laisse dans son sillage, que nous nommons « amour ».

1 commentaire :

  1. Textes intéressants d'un sujet qui l'est certes tout autant !

    En complément "informatif", si je puis dire, j'ai bien apprécié personnellement ce qu'écrit à ce sujet le Rav Pin'has Friedman, dans un article du site Shvilei Pin'has, intitulé "Les Trois Alef des mots Ehyéh Asher Ehyéh (Je serai qui Je serai) est une Ségoula formidable pour la réussite dans tous les domaines de la vie". ( http://torahdoc.free.fr/torahdoc/[1]%20Parasha/Rav%20Friedman/5775/5775-15-Shemot[FR].pdf )

    Bien amicalement du Québec

    RépondreSupprimer