La sorcière ( ou le sorcier) si elle
est d'une communauté paysanne, a pu commencer par être une gêne,
une honte de la famille parce qu'elle est ''tord'', bossue, ou
pied-bot... ou hors-norme... La jeune fille devient rusée, pour
éviter les ricanements, les coups... Et, c'est de la sorcière
qu'elle est tentée de se rapprocher ...
La sorcière est aussi l'objet d'un
rejet des autres habitants. Elle est parfois une rescapée d'un
massacre avec incendie et pillage où elle a tout perdu, enfants,
mari, famille, maison, tout. Catastrophes qui l'ont laissée « un
peu fêlée sous l'bonnet ». Elle commence par faire peur aux
villageois qui ne la reconnaissent pas, traînant avec elle les
stigmates du malheur. Les gens angoissés la chassent au bois ou au
désert, la traitant de sorcière.
Certaines peuvent réussir, si l'on
peut dire... Un peu d'or vient « récompenser » l'interminable
recherche des plantes, les litanies nocturnes, l'acharnement à
nuire, les sacrifices de bêtes innocentes. De quoi faire choir,
parfois, n'importe quelle raison.. Et, ne plus quitter le monde du
mystère.
Ceux qui s'approchent des secrets liés
aux envoûtements graves et aux sacrifices se coupent d'eux-mêmes du
monde villageois. Ils font peur. Cela devient leur raison d'être.
Ils s'écartent des villages, des hameaux, et finissent par former
une sorte de société où s'établit une hiérarchie instinctive.
La première mention en français de la
sorcière apparaît au milieu du XIe siècle, dans le Roman
d'Éneas (1060). Avant l’an 1000, sous les
Carolingiens, on qualifie ces femmes, qui manipulent des herbes et
que l’on soupçonne d’ensorceler, d’herbariae, de sortiariae,
de fascinatrices, d’enchanteresses, de stryges ou de femmes
maléfiques.
Le portrait type de la sorcière y a
été forgé avec les éléments présents dans l’imaginaire
médiéval, et en premier lieu, le vol des sorcières. Cette
idée du transport par les airs est une croyance antique attestée et
relayée dans le Malleus Maleficarum ( le Marteau
des Sorcières, manuel publié en 1486 par Heinrich Kramer
pour répondre à toutes les questions des juges en matière de
sorcellerie.)
Ainsi, pendant des siècles, les
sorcières furent assimilées aux guérisseurs et aux devins. Les
maladies, les tempêtes, les famines, étaient perçues comme des
phénomènes surnaturels sur lesquels les sorcières possédaient une
certaine emprise. On les disait également capables de voler la nuit,
de se transformer en animal et il était admis qu'elles se
rassemblaient régulièrement autour du Diable, à l'occasion de
diverses célébrations. Ces femmes étaient craintes et leurs
supposés pouvoirs attisaient la méfiance et les jalousies. Alors,
les sorcières furent proclamées ennemies du genre humain et chacun
se crut en droit de les faire mourir.
Mais aux alentours de 1300, nous n'en
sommes pas encore là...
Pour l'Eglise, la sorcière est déjà
passée sous l'influence du Diable, mais pas vraiment sous le statut
d'hérétique... Ce qui lui donnera prochainement droit aux procès
d'inquisition...
Craintes par les villageois, elles se
font discrètes Malgré tout, la plupart des villageois fait
appel à leurs services. Elles font des incantations, des
dessins dits « magiques » pour compléter leurs
remèdes ou pour servir à invoquer les forces du mal... La sorcière
est recherchée puis jugée avant d’être punie, d’abord
légèrement. Les conditions de vie sont dures et le Diable est tenu
pour responsable.
A
noter quelque chose d'intéressant :
A propos du transport
au sabbat, le Canon Episcopi, datant de 906
est très clair : le vol des sorcières est une invention, une
affabulation ou un rêve qu’il ne faut pas prendre au sérieux,
tout comme la participation effective au sabbat. Par contre, pour la
plupart des théoriciens de la chasse aux sorcières du XVIe siècle,
le sabbat existe bel et bien ! En 1451, des femmes se déplacent
à califourchon sur leur outil de ménage. "Le champion des
dames", d'un certain Martin le Franc, est un manuscrit que l'on
qualifierait aujourd'hui de pseudo-scientifique. Selon l'ouvrage, les
sorcières vaudoises volent vraiment dans les airs !
Le
Christianisme transforme aussi progressivement la sorcellerie. Les
formules se christianisent; on fait appel aux Saints et à la Vierge
pour faciliter les opérations magiques. (Claude Lecouteux, “Le
livre des grimoires”)
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