La Toussaint serait en concurrence avec
Halloween... Et les catholiques s'agaceraient facilement d'une telle
lèse-majesté... !
Il n'y a pourtant, à mon avis, que du
bien à reconnaître les racines païennes de nos fêtes religieuses.
Ce 1er novembre en est un bon exemple.
De ce que nous connaissons aujourd'hui,
l'origine de ce ''passage'' est célébré par la fête celtique
Samain ( Samhain, Samhuinn) : C’est une fête de
transition et d’ouverture vers l’Autre Monde, celui des dieux.
Elle est mentionnée dans de nombreux récits épiques irlandais car,
de par sa définition, elle est propice aux événements magiques et
mythiques. Sa traduction littérale est : "Fin de l'Eté".
L’époque de la Samain annonçait la
fin des récoltes, l’arrivée du froid et la fameuse nuit où le
Dieu de la Mort (Sucellus chez les gaulois et Dagda en Irlande)
permettrait aux morts de vivre le temps de quelques heures aux côtés
des vivants .
Son importance chez les Celtes est
incontestable, puisqu’on la retrouve en Gaule sous la
mention 'Tri nox Samoni' (les trois nuits de Samain).
Les moines irlandais qui ont mis par
écrit les coutumes celtiques, à partir du VIIIe siècle,
ont fixé le jour de Samain au 1er novembre (selon notre
calendrier moderne). La fête de Samain connaîtra plusieurs
métamorphoses au cours des siècles, jusqu'à la fête
d'Halloween qui en reprend plusieurs caractéristiques...
Autour des années 1800, la citrouille s'imposa comme le légume
que l'on creusait ( du fait de sa taille ) pour y déposer une flamme
et se prémunir des esprits mal intentionnés...Dans le conte de Perrault ' Cendrillon ' , une jeune fille de bonne famille, traitée de souillon par sa belle mère, se rends au bal dans une citrouille transformée en un magnifique carrosse… Ici, de part sa forme ronde la citrouille serait un symbole de l’abondance, de fertilité et de féminité . En effet, c’est une plante particulièrement prolifique, grosse, et bien riche en graines. Dans le conte, la citrouille serait présente pour transporter Cendrillon de sa vie de jeune fille à sa vie de femme, de la misère où elle vit à la richesse avec son prince..
Dans le christianisme, la Toussaint
apparaît d'abord en Orient, où une fête de l’ ensemble des
martyrs chrétiens apparaît au IVe siècle. Cette commémoration
a lieu alors à des dates variables, mais plutôt proches de Pâques,
donc au printemps. En Occident, la fête de tous les martyrs n’est
attestée qu’à partir du VIIe siècle, à Rome. Puis, on
retrouve les moines irlandais, et l'Angleterre, où une fête de tous
les saints, et pas des seuls martyrs, commence à être célébrée
le 1er novembre.
Au VIIe siècle, l'église catholique
fait du Panthéon de Rome une église dédiée à Sainte-Marie des
martyrs. Ainsi, au culte des divinités romaines se substitue le
culte des saints catholiques. La Toussaint, ( jamais mentionnée dans
la Bible …) fête de tous les saints est créée
par le pape Boniface IV, en 610 de notre ère.
En 833, l’empereur Louis le Pieux,
fils de Charlemagne, la prescrit dans l’ensemble de l’Empire
d’Occident.
Cette fête n'est pas sans
enseignement, même si elle ne trouve pas son origine dans notre
religion ( bienheureuse inculturation …!). Pour y réfléchir
revenons à notre mémoire collective, qui s'exprime ici au travers
du conte '' Cendrillon ''.
« La citrouille jaune d'or ,
qui mûrit à l'automne et attachée dans le conte à l'heure de
minuit : moment important qui renvoie à la grande fête
celtique de Samain. Le jour de Samain, plus exactement dans la nuit
du 1er au 2 novembre, le monde visible et le monde invisible
communiquent. Le passage qui se fait de l’un à l'autre entre leurs
habitants représente une faveur autant qu’un péril. Cendrillon (
image de l'âme …) se rendant au bal céleste est-elle suffisamment
parée et préparée pour dépasser minuit, pour franchir sans
dommage le pont qui mène à l'autre monde ?. »..
extrait de ''Une robe de la couleur du temps – le sens spirituel
des contes de fées'' de Jacqueline Kelen
Je ne vais pas reprendre l'ensemble de
ce conte ; ce pourrait être – ce dont je suis persuadé –
une démonstration que le conte retrouve, avec les images
religieuses, leurs racines communes mythiques …
Je voudrais seulement profiter de ''Cendrillon '' pour évoquer le problème de
l'interprétation d'une lecture d'un conte, ou d'un passage de
l'Evangile …
Dans le Conte de Cendrillon, la
belle jeune-fille ( l'âme) avance à pas délicats - précisément
parce que suivant les conseils de la fée-marraine il ne faut point
marcher avec de gros sabots... J'en viens à ces étranges souliers,
désignés par ''pantoufle'' par Perrault... Ce sont des souliers de
fête ; et certains commentateurs peu portés sur la symbolique
tiennent à lire « vair » ( plus réaliste ), alors que
l'auteur a bien précisé dans son titre '' Cendrillon ou la Petite
Pantoufle de verre '', pour insister que cet accessoire n'est pas
superflu...
« Comme le récit concerne le
voyage terrestre de l'âme, la pauvre souillon porte de lourds sabots
de bois, mais à la jeune fille allant vers son destin radieux
convient ce qu'il y a d'inouï, ces pantoufles de verre délicates,
transparentes, qui laissent passer la lumière. Dans son ascension
spirituelle, l'âme a besoin d'un véhicule incomparable, unique (
fait pour elle seule) ». J. Kelen . Il y a encore toute la symbolique
du verre … qui disparaît avec le '' vair ''.. !
Ceci me fait penser, à tous les
commentateurs de la Bible, qui cherche en priorité le concordisme,
avec ce qui leur semble être le seul ''réel'', et tenant à
insister sur la ''matérialité'' de tout fait...
La lecture des contes me semble être
un très bon exercice à la lecture de la Bible...
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