« Nous sommes ici à la croisée des concepts de handicap, de normalisation et de performance et nous risquons de fabriquer, y compris via la sélection des embryons ou des manipulations germinales, un homme “supérieur” alors que notre société a besoin de justice, de convivialité et de sobriété », dénonce le biologiste Jacques Testart.
* Oui, aujourd'hui il est temps « de s'interroger sur les critères d’appartenance à l’humanité. Sont-ils quantitatifs – reste-t-on homme (femme) tant que l’on n’est pas modifié par plusieurs ajouts substantiels – ou qualitatifs, autrement dit la nature humaine se définit-elle avant tout par ce qui touche au cerveau et donc à la personnalité, à l’émotion, aux sentiments, à l’« âme » ? » (Journal La Croix)
** Désigner qui est « humain » a toujours été essentiel, pour déterminer la place de tous ceux que nous désignons comme ne l'étant pas … ! Ainsi la place de l'animal, n'est pas réellement pensé. Certains avancent même qu'il serait souhaitable d'inventer un nouveau mot, pour déterminer une partie des vivants : le mot « sentient ». En effet, en français il nous manque un mot pour désigner la chose la plus importante du monde, peut-être la seule qui importe : le fait que certains êtres ont des perceptions, des émotions, et que par conséquent la plupart d'entre eux (tous ?) ont des désirs, des buts, une volonté qui leur sont propres.
*** Comment qualifier cette faculté de sentir, de penser, d'avoir une vie mentale subjective ? Les Anglo-saxons ont le nom sentience (et l'adjectif sentient)...
Jusque récemment, si l'humain était ( seul ) fait à l'image de Dieu, il bénéficiait d'un statut de droit divin dénié aux autres êtres sentients. L'humanisme, laïcisation du monothéisme, a depuis établi que par Nature l'humanité est l'espèce supérieure: du fait de la liberté dont elle témoigne en s'«extrayant de la nature», elle est redevable d'une dignité particulière, qui justifie de lui octroyer des droits fondamentaux.
Ces droits humains semblent prendre toute leur valeur d'être refusés aux autres. « Croissez et multipliez, et dominez tout ce qui sur la terre court, saute et rampe, vole et nage » reste le discours fondamental. C'est ainsi, que la notion d'humanité s'est créée d'emblée par opposition à l'animalité et à la nature.
Placer la valeur suprême dans l'humanité n'a pas d'autre fonction que d'empêcher la prise en compte de la sensibilité/sentience (= possibilité de ressentir les sensations) comme critère fondamental.
Le 7 juillet 2012, un groupe d'éminents chercheurs (1) s'est réuni à l'université de Cambridge pour la Première conférence annuelle dans le but de réévaluer le concept de « conscience » chez l'être humain et l'animal; cette conférence a donné lieu à une « déclaration » sur la conscience animale signée par certains des plus grands esprits au monde. Philip Low, de l'université de Stanford, a noté lors de son intervention avant lecture de la déclaration que le groupe de chercheurs était parvenu à « un consensus sur le fait qu'il était peut-être temps de faire une déclaration publique... Il peut sembler évident à tous ceux qui sont rassemblés ici que les animaux sont doués de conscience ; cela est loin d'être évident pour le reste du monde »
(1) ( Des experts en neurosciences cognitives et computationelles, des neuropharmacologues, des neurophysiologues et des neuroanatomistes, dont Kristoff Kock et Stephen Hawking ont présenté leurs recherches et sont intervenus au cours de la conférence. Pour une liste complète des chercheurs et intervenants à la conférence, on peut se référer à : http://fcmconference.org/ )
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