vendredi 14 avril 2017

Roger de Laron et le ''Grand Oeuvre'' – 7/.- Le Roman de la Rose

Roger de Laron, comme nous l'avons vu, a fait la jonction entre Chypre, L'Italie et l'Angleterre. 
Les liens sont Templiers, cependant l'Ordre n'existe plus. D'autres associations vont permettre à tous ces hommes et femmes, de maintenir leur lien et leurs connaissances... 
Ainsi en est-il de la ''Fede Santa'' ou des ''Fidèles d'Amour'' … Dante Alighieri ( 1265-1321), a fait partie de ces deux groupes. 
La Rose devient l'emblème de ceux qui se réunissent ''sub rosa'' ( sous la Rose), ralliement des compagnons qui préservent un savoir ''fragile''... La Rose symbolise très bien la connaissance parfaite et l’aboutissement triomphant du Grand Oeuvre et de la Quête du Graal...


Nous reviendrons, bien sûr à Dante... Mais avant cela, il nous faut comprendre, l'apport de la culture littéraire de l'époque et de ''La Rose'' en particulier...

Marguerite d'Albret que je symboliserai par une ''rose'' a rencontré Roger qui représenterait alors la ''croix''... Leur destin restera lié ; et ils ne se quitteront plus, sinon par la mort...
Pourquoi la ''rose'' ? - Parce qu'elle fait partie du vocabulaire de l'amour courtois... Elle symbolise la connaissance cachée ( un chemin chargé d'épines …), la découverte de la Pierre Philosophale, et la rose épanouie représente la seconde naissance... Et, la rose est femme !
De plus, en couple, chacun peut suivre une voie. La voie au creuset (voie sèche), ou la voie à l'alambic (voie humide).
La voie humide – voie longue et riche - comprend les macérations, le travail dans des cavités... C'est la voie des ''conteurs'' ( le conte est l'image d'un secret)... C'est une voie spirituelle, et se dit ésotérique...
La voie sèche, accessible aux aventuriers, aux voyageurs( le ''voyage en Orient''), au vieux chercheur à la veille du soir de sa recherche, et à celui qui retrouve son cœur d'enfant : c'est l'oeuvre au noir. Cette voie longue est ''exotérique'' ; elle agit. Plus rapide, plus risquée...
Ces deux voies laissent entrevoir la complexité du chemin, et de tous les croisements possibles … Quand elles s’installent ensemble, on dit que ce cheminement emprunte la Voie de la Main Gauche, ou Droite, selon qu'il y ait pratique sexuelle ou non …
Tout ceci, c'est la théorie... mais les passions ajoutent beaucoup d'obstacles sur le Chemin, et parfois la Voie débouche sur le Chaos...

La rose était au moyen-âge ce que nous appelons aujourd’hui l’aubépine, la rose sauvage. La ''blanche épine'', représente une protection pour que les secrets soient bien gardés.

Le Roman de la Rose (1260) de Guillaume de Lorris (1200-1238) et achevé par Jean de Meung (1240-1304) sous une forme légère, reprend les mystères de l'Alchimie; ainsi, au-delà des péripéties amoureuses, se cache un message...
« Si quelqu'un me demande comment je veux que ce récit soit intitulé, je répondrai que c'est le Roman de la Rose où tout l'Art d'amour est enclose... Que Dieu me fasse la grâce que celle-là l'agrée, à qui je le destine: c'est celle qui a tant de prix et qui est si digne d'être aimée qu'on doit l'appeler la Rose ». Guillaume de Lauris

Le roman est présenté comme un rêve... L’Amant se lève, dans son songe, de bonne heure et part se promener. Il rencontre un jardin protégé par une haute muraille fortifiée, sur laquelle il y a des peintures représentant les vices en guise d’images (Haine, Félonie, Vilenie, Convoitise, Avarice, Envie, Tristesse, Vieillesse, Papelardie ou hypocrisie, Pauvreté). C’est le jardin de Déduit (Plaisir); la représentation des vices sur la paroi extérieure du mur semble annoncer que quiconque tente d’entrer doit laisser ces vices dehors.
Entré en rêve dans le jardin où réside le dieu d’Amour, le narrateur y tombe amoureux d’un bouton de rose. L'Amant est alors accueilli par une série de personnifications dont les unes préfigurent les avancées, les autres les reculs de l’Aimée, qui se présente d'abord sous les traits de 'Oiseuse'.
Oiseuse, sous le double signe de la disponibilité et du plaisir, apparaît comme la figure médiatrice ambivalente, la clef qui donne accès à la fois à l’expérience amoureuse et à l’expérience littéraire sous son aspect herméneutique et hédoniste.
C'est qu'autour de la Rose évolue le ballet des complices et des adversaires de l'Amour, conduits respectivement par 'Bel-Accueil' et par 'Danger' (ce dernier symbolise les obstacles de toute sorte que rencontre la passion). 
« Celui qui lira ce songe jusqu'au bout y apprendra beaucoup touchant les jeux d'amour, pourvu qu'il veuille bien attendre que j'élucide et interprète mon songe. La vérité qui est couverte d'un voile lui sera alors évidente... Je savais que je ne pouvais guérir que par le bouton (de Rose) que je convoitais de toute mon âme. » Guillaume de Lauris
De même, que le '' Dormeur'' doit desclore la rose, le lecteur doit desclore le sens allégorique...

Au début, au centre du jardin carré de Déduit, est la Fontaine de Narcisse. Au fond de son bassin se trouvent deux pierres de cristal qui reflètent, suivant le côté où on les regarde, une moitié ou l'autre du jardin. Cette première fontaine, si trouble que " quiconque y met la tête pour se mirer n'y voit goutte ", c'est le but du premier œuvre, le dissolvant universel, la coction au cours de laquelle le mercure et le soufre seront unifiés par le sel et, par la putréfaction, mèneront à l'œuvre au noir.


Par-delà cette fontaine, au-dessus d’une haie d’épines, l’Amant aperçoit un bouton de rose sur sa tige. Aussitôt le dieu Amour le larde de cinq flèches, dont une à l’œil qui arrive droit au cœur.
Largesse, Jeunesse, Beauté et d’autres ( figures positives ) délivrent des conseils à l’amant pour conquérir la rose.

Tout irait bien, pourtant, si ce paradis n’était plein d’esprits contraires, de dangers, de peurs, de méfiance et de jalousie.
'Bel Accueil', qui a pitié du pauvre amoureux, l’aide à franchir la haie d’épines. A cet instant apparaît, furieux, 'Danger', armé d’une énorme massue, qui met en fuite les amis. Bel Accueil, d’ailleurs, sera empoisonnée, heureusement sans en mourir. Jalousie enferme la Rose dans une tour, mais l’Amant a pu obtenir un baiser d’elle.

( La partie du roman de Guillaume de Lorris s’arrête là)

Il faut noter que l’image négative de la femme - par l’ecclésiastique Jean de Meung - a profondément choqué Christine de Pisan (1364-1430)... En effet, la continuation de l’ouvrage, entreprise par Jean de Meung, procure un contraste saisissant avec la première partie.

L’amant doit recourir aux bons offices d’une vieille femme expérimentée, qu’il faut payer, s’entend, et par son intermédiaire faire parvenir à la femme des présents. On peut, certes, leur ajouter des poésies, mais qu’il ne se fasse nullement illusion, ils seront de peu de secours... La meilleure route qui mène au coeur des femmes est le chemin de Trop Donner...
Une première tentative d’assaut, menée par le dieu d’Amour, échoue. Il faut que sa mère Vénus accoure à son secours, sur un char que tirent des colombes. Nature, qui avait songé d’abord à laisser périr la race des hommes, ainsi que son compagnon Génius entreprennent le siège du château où a été enfermé Bel Accueil. La déesse Vénus, exécutrice des oeuvres de Nature, somme Honte et Peur de se rendre (ce langage est trop transparent). Enfin la déesse jette un brandon allumé dans la tour. Bel Accueil est délivré et l’Amant peut enfin cueillir sa rose.

« Lorsque je me fus approché de la rose, je la trouvai un peu grossie, et remarquai qu'elle avait crû depuis que je ne l'avais vue de près ; elle s'élargissait par en haut ; je vis avec plaisir qu'elle n'était pas ouverte au point de découvrir la graine, mais qu'elle était encore enclose de ses feuilles qui se tenaient droites et remplissaient tout le dedans. Pleine et épanouie, elle était, Dieu la bénisse!, plus belle et plus vermeille qu'auparavant. Je m'ébahis de la merveille et je sentis qu'Amour m'enlaçait de ses liens plus fort que jamais. »
Derrière l'allégorie sexuelle évidente, le processus alchimique est bien caché, mais aussi bien présent.

A la fin, est la Fontaine de Vie, située au centre du Parc de l'Agneau, qui a la forme d'un cercle parfait. Et au fond est placée une escarboucle ( pierre précieuse grenat rouge) admirable, dont les vertus sont longuement décrites. Cette escarboucle flamboyante, c'est évidemment la Pierre Philosophale, située au centre du Paradis Terrestre ouvert à l'Adepte...
La rose symbolise le processus alchimique, et la rose rouge plus particulièrement l'obtention de la pierre philosophale. L'Amour symbolise la Foi qui anime les Alchimistes


« Avant que je partisse de ces lieux où je fus encore demeuré volontiers, je cueillis à grande joie la fleur du beau rosier feuillu, et j'eus la rose vermeille. Alors il fit jour et je m'éveillai. »

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