lundi 2 juin 2014

L'histoire de la bible -2/3-

L’auteur nous propose de déconstruire la Bible, en recherchant, par tous les outils à sa disposition, à reconstituer les diverses étapes de l’écriture et des réécritures des textes bibliques.
Ainsi, Thomas Römer nous fait découvrir que la relation entre le peuple d'Israël et son Dieu n'existait pas depuis les origines, qu'elle s'est mise en place petit à petit et que c'est en interrogeant les textes, les contextes, les documents extérieurs à la Bible, l'archéologie aussi, que l'on peut comprendre comment cette relation s'est construite. Il nous raconte avec talent comment l'exil du peuple judéen à Babylone a déclenché l'écriture et a donné lieu à une relecture de l'histoire du peuple juif qui a compris son histoire à partir de cet événement. Il nous apprend aussi que dans le Pentateuque se côtoient deux visions antagonistes de l'humanité, l'une inclinant vers l'élection exclusive du peuple juif, l'autre développant une conception universaliste de l'être humain.

Quant à Abraham et Moïse, personnages « non-historiques », dont l'historicité relèverait plutôt de récits mythiques. Mais ceci n'enlève rien à leur importance puisqu'un mythe est une histoire fondatrice qui répond aux interrogations des origines et qui sert à donner une identité à un peuple ou une société. Ces récits concernant Abraham ou Moïse ont été longuement transmis oralement et se sont progressivement modifiés au cours des siècles.
«Dans le Pentateuque, le thème de l’exil est présent entre toutes les lignes ; il est la clé de lecture qui donne sens à l’édifice rédactionnel.» T Römer, repère deux visages des «Pères»: l’un souligne la filiation de l’humanité avec les patriarches, l’autre met l’accent sur l’alliance et l’élection promises aux fils d’Israël en marche vers la terre promise.. ainsi Thomas Römer nous explique la coexistence extraordinaire dans l'Ancien testament, de deux théologies : la sacerdotale qui porte l'espérance inébranlable dans la capacité divine d'aller chercher l'humain par delà ses chutes, et la deutéronomiste, qui interprète l'histoire de l'Alliance à partir de la rétribution des fautes et tente de prévenir les catastrophes. Les auteurs bibliques ont eu cette immense sagesse de ne pas trancher entre ces deux approches et de les conserver toutes les deux, préférant la diversité à un langage monolithique.
Détails de l'Arc de Titus, à Rome: L'enlèvement des objets sacrés du Temple de Jérusalem
La 'régression' commence avec la mort de Josias au combat, en 609. Elle continue avec l’invasion de Sennachérib en 597, puis la destruction de Jérusalem et 587 et l’exil (déportation des élites, des artisans ...)

- Extraits ( suite)
«La formation du Pentateuque. (..)  C'est à partir de l'Exil, que les diverses traditions d'Israël ont été rassemblées et éditées en un seul texte fondateur de référence. » P75
«  Dans le code deutéronomique, le premier impératif est la vénération exclusive de Yahvé et le renoncement à tous les autres dieux... Ce n'est pas le monothéisme au sens où nous l'entendons aujourd'hui, c'est à dire la reconnaissance d'une seule divinité, à l'exclusion de tout autre. Les deutéronomistes ne nient absolument pas l'existence des autres dieux ; ils ne cherchent pas à démontrer qu'ils n'existent pas. » P109
« Pour les deutéronomistes, l'histoire commence avec l'Alliance scellée dans le désert, après la libération d'Égypte. Dans la conception des deutéronomistes, les origines du peuple sont exclusivement exodiques ; la Création, les Patriarches, leur installation pacifique en Canaan... cela ne les intéresse pas. Eux, ils ont les yeux rivés sur l'Exil et la perte du pays. Ils sont obsédés par cela. Ils veulent expliquer pourquoi la catastrophe s'est produite, avec la conviction que l'histoire est déterminée par le comportement d'Israël par rapport à la Loi : s'il la respecte, tout va bien ; s'il la transgresse, tout va mal. L'exégète Martin Noth disait, à juste titre, que l'histoire deutéronomiste est une grande étiologie de l'Exil. » (P114)

« Sur la formation du Pentateuque, on parle de l'assemblage de divers récits traditionnels, qui a été réalisé par les prêtres et par les scribes au retour de l'Exil, à l'époque perse, pour composer leurs grande fresque des origines d'Israël. » P139
«  pour moi, cette quête du Moïse historique est totalement vaine. Et quand bien même on arriverait à l'identifier, qu'est-ce que cela nous apportrerait ? .. Les gens oublient complètement que ce n'est pas le Moïse historique qui est à l'origine du judaïsme, mais le texte biblique, dont il est le personnage principal. » P165
«  S'il y a eu un exode de populations sémitiques fuyant l’Égypte, il ne s'est pas produit de la façon dont la Bible le rapporte. » P165



A suivre : avec des extraits du livre

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