vendredi 14 mars 2014

Lima de Freitas, peintre portugais

 Il y a un triangle « traditionnel » formé de trois œuvres qui viennent du Portugal : celle de Fernando Pessoa, celle d’Agostinho da Silva, celle de Lima de Freitas
Quand on dit que Lima de Freitas est un initié, que veut-on exprimer ? Que cela commence et finit avec le silence... Quête de l’Être en soi ...
Dans la perspective de notre ego, deux mondes sont distincts. Bien sûr, nous savons qu'au coeur de l'Etre, ces deux mondes sont uns et ne sont pas. L'un et ( est ) l'autre, sont un :

Le texte est de Rémi Boyer 

" Dans l’Un, il y a l’Etre. Dans l’Autre la personne.
Dans l’Un règne le Roi Caché, le Soi, dans l’Autre règne le moi, haïssable ou non.
Dans l’Un, la conscience pratique le Culte du Saint Esprit, ou de l’Esprit Libre, dans l’Autre la conscience est prise dans le culte de l’objet, de l’image et de la consommation.
Dans l’Un, nous sommes dans l’état objectif, pure perception de ce qui est là. Univers perçu. Dans l’Autre, nous demeurons dans un état subjectif. Univers pensé, conçu.

Dans l’Un, nous sommes inscrits dans le non-temps de l’ici et maintenant. Dans l’Autre, nous sommes étirés dans le temps.
Dans l’Un, nous sommes les dévoreurs des temps, passé, présent, futur. Dans l’Autre, nous sommes la proie du temps.
Dans l’Un nous sommes vivants. Dans l’Autre nous sommes vécus.
Dans l’Un nous sommes dans le Silence. Dans l’Autre, nous sommes au sein du bruit et du langage.
Dans l’Un, nous sommes dans l’ataraxie. Dans l’Autre, nous sommes dans l’intranquillité de Fernando Pessoa.
Dans l’Un, L’art est de Ne Rien faire, selon Agostinho da Silva. Dans l’Autre, la préoccupation et l’occupation consistent à avoir et faire.
Dans l’Un, le Verbe est créateur. Dans l’Autre, la parole est perdue.
Dans l’Un, tout est Liberté. Dans l’Autre, il n’y a que conditions et limites.
Dans l’Un, le corps est Esprit. Dans l’Autre, le corps est matière.
Dans l’Un, tout poison devient liqueur des dieux. Dans l’Autre, tout est toxique.
Dans l’Un, tout est immobilité parfaite et fluidité. Dans l’Autre, tout est mouvement et pesanteur.
Dans l’Un, tout est amour. Dans l’Autre, tout est désir, et le désir est toujours mimétique.
Dans l’Un, tout est plénitude du vide. Dans l’Autre, tout est vide désespérant des formes.
Dans l’Un est le sans-forme. Dans l’Autre, sont les formes.
Dans l’Un, nous sommes dans l’invention. Dans l’Autre, nous sommes dans l’imitation.
Dans l’Autre, le triangle archaïque pouvoir-territoire-reproduction agit pleinement en toutes les périphéries de l’expérience. Nous retrouvons la fonction labyrinthique. Dans l’Un, ce même triangle s’est verticalisé en un unique point de Vide. Le Dragon s’est envolé. Passé sans porte. "


Dans le 515, le lieu du miroir, Lima nous dit l’essentiel en quelques mots :
« Dès que l’homme atteint le discernement de la position qu’il occupe dans l’ensemble de la création, en tant que « centre du 4 », autrement dit comme conscience de soi et du monde, issue du jeu des oppositions et des fatalités, contre lesquelles elle a essayé d’affirmer sa volonté – conscience qui finit par saisir l’unité métaphysique qui l’intègre dans le devenir cosmique et qui, simultanément, transforme la soif brûlante d’exister et de vivre en un désir non moins ardent de dépassement de soi et d’intensification ontologique ; autrement dit, dès que l’homme arrive au seuil de la science du bien et du mal et goûte du feu céleste, tout est en place pour le mystère ultime, qui se déroule entre l’orgueil et le don de soi : le dénouement infini du drame conduit la conscience à se saisir comme miroir de Dieu, l’être se trouvant non point dans le miroir, mais dans la Lumière qu’il réfléchit. Infini, en somme, parce que ce dénouement ouvre sur une nouvelle Lumière plus éblouissante encore, laquelle appelle à son tour à une conscience plus aigue, ravie dans l’impatience amoureuse de connaître la Lumière plus pure et plus divine qui est derrière la Lumière. » 515, le lieu du miroir, de Lima de Freitas, Editions Albin Michel


Lima de Freitas (1927-1998) est connu et reconnu comme peintre et écrivain mais il fut aussi dessinateur, illustrateur, graveur, publicitaire, traducteur, essayiste...
Il a ainsi illustré une centaine de livres dont un célèbre Don Quichotte. On a pu parler à propos de sa peinture de surréalisme mystique, mais la qualifier, c’est la restreindre et la limiter.
En 1992, il devint membre de la Commission consultative auprès de l’UNESCO pour la Transdisciplinarité. Il a participé à l’Encyclopédie des Religions dirigée par Mircea Eliade en 1987.

Son épouse et muse, Helle Hartvig Freitas, joua un rôle considérable dans sa vie de peintre et dans sa vie initiatique comme en témoigne sa présence dans nombre de ses peintures.



3 commentaires :

  1. En somme, allons-nous placer notre "centre de gravité" dans le sujet (je suis) ou dans l'objet (je paraîs être) ?

    Dans le "sujet", nous serons maître de nous et nous nous définirons selon nos critères; dans "l'objet" ce seront les autres qui seront maîtres de nous et qui nous définiront selon leurs critères...

    A part cela, j'ai remarqué que, quand nous nous agressons, nous le faisons toujours sur "l'objet" de l'autre, le rôle qu'il ou elle joue, son masque, sa persona. Et jamais sur son "sujet", son être. C'est étrange et c'est à méditer...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il faut placer son centre de gravité dans le JE SUIS et en même temps dans le JE SERAIS mais aussi dans le JE FUS, afin de devenir un être plein en ENTIER, afin de devenir SOUVERAIN de soit même. La fusion des 3 êtres donne le peuple des COEURS ALLUMES. RIEN ne peut être séparé, RIEN ne peut être nié, alors, il faut faire avec. Recevez tout mon amour.

      Supprimer
  2. Oui, c'est bien vu ... mais, peut-il en être autrement? Peut-on jamais appréhender le "sujet"...? Nous en faisons toujours un "objet"... Ces tentatives, nous font tout de même avancer, peut-être moins sur l'autre , que sur soi ...?

    RépondreSupprimer