Me revient en tête, un film comme je les aime : The Grand Budapest Hotel, un film , enfin presque un cartoon en prises de vues réelles, de Wes Anderson.
Le décor est celui du luxe des années 1930, puis du déclin de l'après-guerre communiste. Les cadrages sont millimétrés, révélant parfois frontalement des décors aux allures de maisons de poupée grandeur nature.
« Le goût des miniatures me vient sans doute de l'enfance : je voulais être architecte, je dessinais des bâtiments, je construisais des maquettes. J'ai aussi aimé jouer aux Lego. Mais ce que j'aime par-dessus tout, ce sont les miniatures dans les films : par exemple, les modèles réduits de trains qu'utilisait Hitchcock dans les années 1930. Les maquettes lui permettaient des figures de style que des objets en taille réelle n'auraient pas autorisé. » Wes Anderson
On découvre avec délectation une
galerie de personnages étranges et volubiles qui arpentent des
mondes colorés, très modérément réalistes. Par-delà leur
nature, les héros sont mûs par le devoir qu’ils se font de leur
charge.
C’est une recherche du temps perdu, façon ludique, dont
Monsieur Gustave (Ralph Fiennes) est tout à la fois un Pied
nickelé mélancolique et un roturier élégant, toujours
prêt à constater « qu’il existe encore de faibles
lueurs de civilisations dans cet abattoir barbare autrefois
nommé l’humanité ».Un vieil écrivain se souvient de sa rencontre avec le mystérieux propriétaire du Grand Budapest Hôtel, au temps du communisme. Puis on plonge délicieusement dans le récit de jeunesse de ce propriétaire, dans l'entre-deux-guerres.
Monsieur Gustave est l’une des serviteurs zélés du Grand Budapest Hotel dont chacun ignore qui le dirige réellement. De temps en temps, un avocat nommé Kovacs (Jeff Goldblum) vient s’assurer que les affaires tournent mais les ordres sont émis par une nébuleuse inconnue.
Les années 30 voient l’établissement à l’apogée de son luxe. Des marquises et autres aristocrates argentés viennent se prélasser dans son cadre magnifique et ses paysages montagnards.
Le professionnalisme et la générosité de M. Gustave le conduisent dans le lit des clientes les plus âgées et les plus fidèles du palace. En retour, elles l'élisent comme leur grand amour, voire leur unique légataire.
M Gustave recrute un groom, Zéro (Tony Revolori), lequel va devenir son frère d’armes. A eux deux, ils vont affronter la famille Desgoffe und Taxis dont le fils aîné (Adrian Brody) était la bête noire de sa mère, la charmante et très âgée Madame D. (Tilda Swinton). Et vivre de multiples aventures à la suite d’un héritage et de quelques meurtres. En effet, tout autour gronde la guerre... Nos héros s’emparent d’un trésor ( une toile de maître) , fuient un tueur (Willem Dafoe), échouent chez des pères blancs, en appellent à la solidarité des palaces, bravent la prison, croisent des durs tatoués (Harvey Keitel), utilisent des pâtisseries pour tromper l’ennemi, tiennent tête à des gardes-frontières patibulaires. … Ils prennent le téléphérique, font de la luge, boivent du « pouilly-jouvet » et n’oublient pas de se parfumer d’un nuage de « L’air de panache »…
La scène d’évasion de prison tient des 'pieds-niquelés', d’autre fois on se croirait à la Belle époque de Rouletabille.
«
Plusieurs envies se sont croisées. D'abord, un ami en a inspiré le
personnage principal, Monsieur Gustave, le concierge raffiné et beau
parleur de ce palace imaginaire. Je voulais absolument lui consacrer
un film. Ensuite, le récit reflète mes lectures de ces dernières
années, en particulier la découverte de l'oeuvre de l'écrivain
autrichien Stefan Zweig. La structure des premières scènes, avec
ses mises en abyme successives, vient directement de l'avant-propos
de La Pitié dangereuse. Mais, plus largement, j'ai été frappé
par la voix de Zweig, sa façon de raconter un monde puis de décrire
son écroulement, dont il a été le témoin jusqu'à sa mort,
au Brésil, en 1942. »
Wes Anderson
« Non, je n'ai jamais étudié Proust, mais j'ai lu La
Recherche quand j'étais étudiant à Austin. Je ne sais pas
comment l'idée m'en est venue. Absolument personne n'avait lu Proust
dans mon entourage. » W. And.
Sur le fond, nous pourrions dire que ce film d’Anderson est une allégorie …
* Nous pourrions nous demander s'il est légitime de faire appel à une forme d’allégorisation systématique du réel... Si nous pensons pouvoir dire quelque chose inintéressant, disons-le franchement ...!
* Quelle époque pleure t-on ? Nous sommes les enfants d'une Europe où la quintessence de la culture croisa la barbarie la plus noire. Derrière les caricatures de ces petits personnages de maquette, automates, jouets … se cachent un cœur et une âme. M. Gustave se bat pour cette humanité gracieuse, même artificielle, et se sacrifie pour en dénoncer l'absence.
Il est indiqué que ce film est une adaptation partielle, de l’esprit si ce n’est de l’histoire, de l’autobiographique et testamentaire texte de Stephen Zweig : Le monde d’hier: Souvenirs d'un Européen. L'écrivain, y déplore la perte d’un monde fait d’arts et de raffinement, le Vienne d'avant la guerre.
Zweig, exilé au Brésil et ne supportant plus ce déclin fondamental de l’humanité, se donne la mort ainsi qu'à sa femme, juste après l'envoi du manuscrit chez l’imprimeur.
Tu as vraiment un blog hors du commun, merci pour tous ces voyages! Je vais essayer de trouver ce film si étrange...
RépondreSupprimerJ'aime le cinéma qui fait rêver... En France, le thème des films tournent - le plus souvent - autour de la vie quotidienne affective...
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