Le cadavre du petit valet de Malicorne
est découvert nu par un ivrogne ...
Alors que le Maire se rend à la
Mairie ; le portrait tracé par Bernanos du village vaut le coup
d'oeil :
« Déjà tinte l’enclume du
maréchal au fond de la rue muette, l’immense rue muette, lavée de
frais, surprise telle quelle par l’aube, pleine encore des formes
et des rumeurs de la veille. Un moment elle apparaît plus claire,
plus blonde et comme limpide, si fraîche qu’un moribond y poserait
la joue, si proche qu’elle semble au niveau des grandes baies
vides, jette au plafond son reflet… Mais déjà l’ombre l’a
prise en écharpe, puis galope d’un bout à l’autre, jusqu’à
la dernière crête visible, la montée de Trablois dont le mince
copeau d’or saute à son tour. Le ciel gris s’élance de toutes
parts en rugissant, puis s’apaise aussi vite : une pluie fine
commence à tomber, l’angélus sonne. »
Ensuite, Bernanos nous fait le portrait
du nez de Monsieur le maire : « Son nez verni par
l’herpès avec son réseau de veinules bleues, sa rondeur
élastique, son excessive mobilité, terrorise sa femme. À vrai dire
au milieu de cette face usée, il éclate d’une vie effrayante,
goguenarde. « C’est mon gris-gris », disait-il jadis
aux demoiselles. Et plus d’une a voulu tenir dans sa paume ce nez
monstrueux car l’ancien brasseur ne cache pas son goût pour les
fillettes. « Oui, ma petite, figure-toi, j’ai senti battre
son cœur tout au bout, c’est comme si tu tenais une vraie
bête. » » Et ça continue... Bref... ! Je ne
vais pas recopier tout le livre … !
Et, à partir de maintenant, vous ne
devriez plus relâcher votre attention, et ce livre.... Tout devient
grandiloquent, rendu par les dialogues entre le médecin, le maire et
Jambe-de-laine, qui vient apporter une pièce à conviction pour
dénoncer celui qu'elle ne cesse d'accuser de tous les maux : M.
Ouine...
Ce roman ' Monsieur Ouine' est à la
fois un récit policier et une galerie de portraits où l’on
retrouve les personnages bernanosiens déjà rencontrés dans les
précédents romans. Il est considéré par beaucoup comme le sommet
de l’art de Georges Bernanos.
Cet étrange ancien professeur Monsieur Ouine dont le corps est
mou, l’esprit perdu et la souffrance terrible, donne son nom au
roman ; même si son rôle ne m’apparaît pas central ( à
moins que ce soit une ruse du Diable .. ? )…
Le lecteur lui-même s'embourbe...
Très vite, après avoir franchi le cap des premières pages, et compris la cohérence des personnages et la chronologie des faits ; ce roman m’apparaît fascinant, et assez désespéré. La figure du Mal sous-jacente semble ici victorieuse... Dieu a été chassé du monde des hommes et Satan s’y est installé...
Bernanos nous offre tout de même et bien sûr un jeune prêtre, le curé de Fenouille, le procureur malheureux de ses ouailles pécheresses, qui désespère de la mort de sa paroisse. Il y a aussi le médecin du village, le pendant athée du curé, pas moins désespéré que lui. Il y a encore l’extraordinaire maire du village que la débauche a rendu fou.
Illustrations de Fritz Eichenberg
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