Les
moines sont irremplaçables, parce qu'ils appartiennent à un autre
monde, et nous permettent, à nous les visiteurs, d'en goûter
quelques miettes ….
Ainsi,
ce visiteur : « Dans
la société habituelle, il faut être toujours fort, invincible,
concurrentiel. Ici, la norme, à l’inverse du quotidien, c’est de
pouvoir reconnaître notre faiblesse, notre fragilité. C’est le
seul endroit où je peux me reconnaître tel que je suis. »
F. Stanislas,
reçoit pour aider les personnes qui le visitent à retrouver des
repères : « Les
gens qui viennent me voir, j’essaie
de les mettre en face de leur parole.
Selon moi, la parole a mieux à faire que de résoudre des problèmes
: elle structure l’homme ou la femme qui parle. »
Autres paroles de ces frères, souvent silencieux, et qui ont d'autant de poids
...
« En
entrant ici, on ne largue pas notre humanité. La Parole de Dieu ne
vient pas tout rétablir. Elle n’est d’ailleurs pas de la
guimauve et je pense que notre communauté monastique est très
inspirée du combat de Jacob. Pourtant, il existe une réelle
solidarité intérieure, très profonde, entre nous, mais aussi avec
toute l’humanité, car nous menons le même combat. »
« Avec
mes frères, nous sommes dans le même bateau et j’ai envie qu’il
arrive à bon port. C’est-à-dire, que mes frères trouvent
Dieu », poursuit
le F. David. Sans nul doute, cette quête commune d’un Dieu
jamais totalement saisissable crée-t-elle plus de solides amitiés
que d’irréparables inimitiés : « Bien
sûr, on s’attache aux frères. Quand j’arrive pour les laudes à
6 h 20 chaque matin et que je vois tous ces hommes présents
dans l’église pour prier, je me sens alors regonflé pour toute la
journée. Nous sommes pris en charge autant que nous prenons
en charge », témoigne
le F. Thomas, 82 ans, maître des novices, à En-Calcat
depuis 1951.
« Ceux
qui ne restent pas sont ceux qui se cherchent eux-mêmes. L’unique
question que moi-même et tous mes frères se posent est celle-ci :
“Cherches-tu vraiment Dieu ?” …
« C’est
un défi qui nous est relancé tous les jours avec les frères, une
mise à l’épreuve qui est la structure de notre vie. Quand un
nouveau frère entre dans la communauté et qu’on pressent qu’il
est d’un caractère difficile, on se dit qu’il va beaucoup
déranger. En réalité, c’est Dieu qui nous propose une grâce de
choix et qui nous dit : “Vous allez me découvrir encore plus grand
que vous me croyez, car je me révèle à vous à travers la
différence de ce frère nouveau”. Heureusement, lui aussi va
évoluer. Au monastère, on se bonifie, comme le vin. J’en connais
entrés ici très durs et qui sont devenus très tendres. »
« Au
contraire d’une entreprise qui doit capitaliser pour réinvestir et
se développer, notre monastère n’attend aucun retour sur
investissement. On ne thésaurise pas, on ne garde pas. Certes, il
faut entretenir les bâtiments, soigner l’accueil, mais on
redistribue tout ce qui ne nous est pas nécessaire. Le seul “retour
sur investissement”, si l’on peut dire, c’est notre vie
fraternelle, et cela, ce n’est pas quantifiable ! »
Sources: La Croix du 13 juillet. A En-Calcat ( Tarn)